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Mort d’un jeune Palestinien: 9 mois ferme pour un policier israélien

Majeda El-Batsh,
La Presse, 25 avril 2018

Un
policier israélien a été condamné mercredi à neuf mois de prison ferme et six
mois avec sursis pour avoir tué en 2014 un adolescent palestinien qui ne
semblait représenter aucun danger selon des images de vidéosurveillance et de
télévision.
Le
tribunal a accepté un accord de plaider-coupable prenant en compte le fait que
Ben Deri avait collaboré aux investigations et n’avait aucun antécédent. PHOTO
AFP

Un
tribunal de Jérusalem a déclaré Ben Deri, 24 ans, coupable d’homicide par
négligence. Il l’a également condamné à verser 50 000 shekels (18 000 $ CAN) à
la famille de Nadim Nouwara, tué à l’âge de 17 ans le 15 mai 2014 à Beitunia,
en Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par Israël.

Un autre
adolescent avait été tué au même endroit dans des circonstances semblables un
peu plus d’une heure plus tard. Un autre encore avait été grièvement blessé.
Ben Deri
n’était poursuivi que pour la mort de Nadim Nouwara. La famille du deuxième
adolescent tué avait en effet renoncé à saisir la justice israélienne dans
laquelle elle n’avait aucune confiance, selon la branche palestinienne de
Defense for Children International, l’une des organisations qui avaient publié
des images de vidéosurveillance privée.
Ces
images ainsi que d’autres tournées par la chaîne de télévision CNN avaient
contribué au retentissement des évènements alors que l’armée israélienne avait
affirmé initialement qu’aucun tir à balle réelle n’avait eu lieu ce jour-là.
Elles avaient ravivé les accusations régulières d’usage excessif de la force, y
compris contre des enfants, de la part des forces israéliennes vis-à-vis des
Palestiniens.
Un
responsable de Defense for Children International Palestine, Ayed Abou Iqtaish,
joint au téléphone, a jugé minimale la peine prononcée mercredi. «C’est presque
ce que reçoit un enfant palestinien qui lance des pierres», a-t-il dit.
Hanane
Achraoui, une haute responsable palestinienne, a jugé «insensée» cette
condamnation en comparaison avec les huit mois infligés en mars par un tribunal
militaire israélien à une adolescente et militante palestinienne qui avait
giflé des soldats postés devant chez elle.
Les faits
de Beitunia sont pourtant constitutifs de «crime de guerre» et «crime contre
l’humanité» au regard du droit international, a-t-elle dit dans un communiqué.
Le père
de Nadim Nouwara, Siam Nouwara, a dit avoir saisi la justice israélienne «parce
qu’il n’y avait pas d’autre moyen», mais a dénoncé un «déni de justice qui
attisera la violence».
Les faits
s’étaient déroulés lors de manifestations marquant la «Nakba» («catastrophe» en
arabe) que représente pour les Palestiniens la création d’Israël en 1948 et le
sort des centaines de milliers de Palestiniens jetés sur les routes lors de la
première guerre israélo-arabe qui a suivi.
Beitunia
avait été ce jour-là le théâtre d’escarmouches à distance entre jeunes lanceurs
de pierres palestiniens et forces israéliennes. Des images de CNN à l’époque
montrent, selon la chaîne, Nadim Nouwara lançant une pierre vers les forces
israéliennes. Ces dernières paraissent assez loin pour ne pas être en danger
imminent.
La
vidéosurveillance montre ensuite les deux adolescents s’écrouler au même
endroit à une heure quinze d’intervalle.
Selon la
presse israélienne, le garde-frontière a fait valoir au cours de son procès
qu’il avait introduit par erreur des balles réelles dans son M-16 au lieu de
projectiles anti-émeutes.
Les
gardes-frontières, une unité dépendant de la police, sont régulièrement engagés
au côté de l’armée face aux troubles palestiniens.
Le
tribunal a accepté un accord de plaider-coupable prenant en compte le fait que
Ben Deri avait collaboré aux investigations et n’avait aucun antécédent.
Palestiniens
et Israéliens vont cette année au-devant d’une nouvelle commémoration de la
«Nakba» à hauts risques. À la fin du printemps 2014, un cycle de violences
avait provoqué une escalade menant à la guerre dans la bande de Gaza.