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En Iran, l’accès à l’éducation des réfugiés afghans s’améliore

Par Marina Villén, Euractiv, 15 feb 2018

L’école
n’est pas un droit pour les enfants afghans réfugiés en Iran. Mais le lancement
récent d’un programme de scolarisation a permis d’améliorer la situation. Un article d’EuroEfe
 
Un enfant
afghan fabricant des briques à Qasem Abad, à la périphérie de la ville
iranienne de Varamin, dans la province de Téhéran. [Abedin
Taherkenareh/EFE/EPA
]
 

Malgré la
pression exercée pour que les réfugiés quittent l’Iran et les campagnes de
rapatriement d’agences comme le Haut-Commissariat des Nations unies pour les
réfugiés (HCR), il est difficile pour ces Afghans de retourner dans un pays
ravagé par des conflits qui se succèdent depuis l’invasion soviétique en 1979.

En 2016,
l’Afghanistan était le deuxième pays générant le plus de réfugiés dans le
monde, après la Syrie.
Le HCR
avait enregistré 2,5 millions de réfugiés afghans, presque tous dans les pays
voisins : l’Iran a accueilli un million d’entre eux et le Pakistan 1,4
million. En Europe, l’Allemagne est en première ligne avec 43
.000 demandeurs d’asile afghans.
 
Scolariser
les enfants

En Iran,
cependant, pas moins de deux millions de réfugiés afghans sont en situation
irrégulière.
Récemment,
les autorités iraniennes ont lancé des programmes de scolarisation pour les enfants
afghans (notamment ceux ne possédant pas de permis de séjour), de
régularisation des sans-papiers et d’assouplissement des conditions requises en
matière de séjour.
«Nous souhaitons que les enfants
puissent aller à l’école, qu’ils aient des opportunités d’emploi
», a déclaré Cornelia Ernst,
l’eurodéputée allemande du Groupe confédéral de la Gauche unitaire
européenne/Gauche verte nordique, à l’agence de presse espagnole Efe. Cornela
Ernst est membre de la délégation pour les relations avec l’Iran, présidée par
Janusz Lewandowski, qui s’est rendue dans le pays à l’occasion de l’une des
réunions interparlementaires régulières entre l’Iran et l’UE.
À la fin
de leur rencontre avec les députés et les autorités iraniennes, la délégation
s’est rendue dans un des centres d’enregistrement et de soins pour les réfugiés
afghans à Ispahan, dans le centre du pays.
L’Union
européenne, qui finance des projets humanitaires en Iran depuis 1997, a alloué
10 millions d’euros pour aider les réfugiés afghans résidant dans le pays,
acheminés par des ONG et des agences des Nations Unies.
Ce budget
est destiné à la scolarisation des enfants afghans en Iran, à l’assistance
médicale et à la sécurité alimentaire. Il doit également aider les réfugiés à
payer la prime d’assurance maladie et à bénéficier de conseils juridiques.
Dans le
centre de soins d’Ispahan, les eurodéputés ont vérifié la qualité des soins
ambulatoires. Ils ont également eu l’opportunité de s’entretenir avec des
médecins et des infirmiers afghans ainsi qu’avec les responsables du lieu,
qui est géré par le gouvernement iranien et le HCR.
Le
gouvernement national a pris des mesures pour inclure tous les Afghans en
situation régulière dans le système national de santé. Les campagnes de
vaccination d’enfants sont par ailleurs fréquentes, en particulier contre la
polio. L’Afghanistan et le Pakistan sont en effet les seuls pays au monde où
cette maladie est encore endémique.
Ali
Khamenei, l’actuel guide suprême, a publié en 2015 un décret destiné à
permettre aux Afghans, en situation régulière ou non, à étudier dans les écoles
publiques iraniennes. En 2016, 48
.000 enfants afghans sans papiers ont ainsi été
scolarisés pour la première fois, et, cette année, le nombre total d’enfants
réfugiés scolarisés a atteint 400.
000.
Rapatriement
ou accueil
?

En 2002,
l’Iran a lancé un programme de rapatriement volontaire nécessitant le soutien
de la communauté internationale et une coopération entre le gouvernement, les
donateurs et l’ONU.
En
novembre, le gouvernement iranien a appelé William Lacy Swing, le directeur
général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), en visite
dans le pays, à agir pour aider les Afghans à rentrer dans leur pays d’origine.
Abbas
Araqchi, le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, a quant à lui appelé
la communauté internationale à contribuer à l’amélioration de la situation en
Afghanistan, en matière de sécurité et d’économie, et préparer ainsi au mieux
leur retour au pays.
En
revanche, Cornela Ernst ne considère pas que le retour des Afghans soit une solution
viable : «
la solution ne peut pas être le rapatriement» puisque l’Afghanistan «n’est pas un pays sûr». Elle juge cependant nécessaire
d’améliorer leurs conditions de vie en Iran, estimant que la question des
réfugiés en situation irrégulière est «
non résolue». Les Afghans doivent donc faire face à
d’importants obstacles, comme un accès limité aux services essentiels et à
l’emploi.
La
plupart d’entre eux n’ont pas d’autres solutions que de se contenter de petits
emplois peu rémunérés nécessitant peu de qualifications, tels qu’ouvrier du
bâtiment ou gardien de parking. À Qasem Abad, à la périphérie de la ville de
Varamin, les fabricants de briques travaillent 14 heures par jour pour un
salaire journalier de dix dollars. De plus, ils ne peuvent travailler que six
mois dans l’année, lorsqu’il fait chaud.
Leur
accès au marché du travail est toutefois facilité par la liberté du choix de
lieu de résidence. 97 % des réfugiés afghans résident dans des zones
urbaines, 33 % d’entre eux dans la province de Téhéran et seulement
3 % sont logés dans des camps de réfugiés.
Comparaisons
inévitables avec la situation en Europe

Janusz
Lewandowski, membre du Groupe PPE, a salué l’accueil que l’Iran a réservé aux
Afghans, «
une mesure
humanitaire en réaction au désastre humain en Afghanistan
».
«C’est une bonne chose d’aider les
réfugiés en Iran. Nous voulons aider, nous ne pensons pas qu’accueillir tous
les réfugiés en Europe soit la meilleure des idées
», a ajouté Cornela Ernst.
Le nombre
de réfugiés en Iran est effarant: trois millions sur une population de
moins de 83 millions. De plus, le pays a dû faire face à de nombreux
défis durant ces quarante dernières années: l’Iran a connu une
révolution (1979), une guerre contre l’Irak (1980-1988) et des années d’embargo
économique international.
Les
comparaisons avec la situation en Europe étaient inévitables lors de la visite
de la délégation parlementaire en Iran. La délégation s’est par ailleurs
entretenue avec Mohammad Javad Zarif, le chef de la diplomatie iranien, et Ali
Larijani, président de l’Assemblée consultative islamique d’Iran.
Flavio
Zanonato, membre du Groupe de l’alliance progressiste des socialistes et
démocrates au Parlement européen (S&D), a admis que l’accueil iranien était
«
positif» et que le pays a accueilli bien
plus de réfugiés que l’Europe.
«Les réfugiés, les demandeurs
d’asile, arrivent en tel nombre en Iran que nous ne pouvons pas nous imaginer
la situation en Europe. En Italie, il y a 250
000 réfugiés et nous disons déjà
que c’est disproportionné alors qu’ils sont trois millions là-bas
», a-t-il ajouté.