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En Argentine, une application pour dénoncer le harcèlement de rue

Par 
Camille Calvier Le Figaro,  11/04/2018

«MuMaLapp».
C’est le nom de l’application lancée par un collectif féministe en vue de faire
état du harcèlement de rue en Argentine, un problème prégnant dans le pays.

Face au
harcèlement de rue, le collectif féministe argentin MuMaLa (Mujeres de la
Matria Latinoamericana) vient de créer une application mobile. Lancée le 6
avril dernier lors de la semaine internationale de lutte contre le harcèlement
de rue, «MuMaLapp» permet aux femmes de signaler de manière anonyme toute
agression ou situation de harcèlement dont elles seraient victimes. Les
utilisatrices devront laisser une description de la situation qu’elles ont
vécue et donner leur âge ainsi leur localisation. L’objectif? Établir une carte
nationale du harcèlement de rue, afin de mettre en lumière l’ampleur de ce
problème persistant dans le pays. Disponible sur Android, l’application a déjà
été téléchargée plus d’un millier de fois en moins d’une semaine et reçoit des
plaintes de tout le pays, ainsi qu’en provenance de Bolivie et du Chili.
L’organisation
MuMaLa, qui milite pour les droits des femmes Argentines, a voulu agir en
réaction aux enquêtes qu’elle a menées en 2016, dans la ville de Buenos Aires
et au niveau national. Les sondages ont montré, que 93% des femmes interrogées
au niveau national ont déclaré avoir connu au moins une situation de
harcèlement dans la rue, et 100% d’entre elles dans la capitale. Le harcèlement
peut se traduire par une remarque sur leur apparence ou leurs vêtements, par
des cris, des sifflements ou des klaxons. MuMaLa espère ainsi que son
application permettra de pointer du doigt la culture du «piropo» (du
compliment), qui qualifie les réflexions que les Argentines reçoivent.
Une lutte
de longue haleine
Mais
l’idée de «MuMaLapp» se veut plus large. L’application pourra produire des
données statistiques, qui seront accessibles à la population, afin d’appuyer
les actions de MuMaLa et des politiques publiques en la matière. En particulier
la proposition de loi en ce moment étudiée par le Congrès argentin qui prévoit
de durcir la législation actuelle. Elle suggère de sanctionner le harcèlement
de rue avec des amendes allant jusqu’à 1000 euros. Déjà fin 2016, le Parlement
communal de Buenos Aires a voté une loi
qualifiant le harcèlement de
rue de délit et le condamnant par des amendes pouvant aller jusqu’à 40 euros.
Une loi qui porte peu ses fruits dans la réalité puisque très peu d’Argentines
portent plainte.
Cette loi
a été adoptée un an après un fort
mouvement de contestation contre les violences sexistes
, en 2015, où
des centaines de milliers de femmes avaient manifesté en réaction à une vague
de féminicides (meurtre d’une femme en raison de son sexe) ayant eu lieu dans
le pays. Le mouvement a donné lieu au collectif #NiUnaMenos, contre les
violences faites aux femmes. En 2017 toujours, une femme était assassinée
toutes les 29 heures, selon l’Observatoire des féminicides dirigé par l’ONG La
Casa del encuentro.