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Angola : Sindika Dokolo à la poursuite des œuvres volées

Nicolas
Michel, jeuneafrique

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Un
homme d’affaire angolais est parti à la chasse des œuvres pillées
dans son pays afin de les y rapatrier. Une mission héroïque, qui
secoue le marché.

Gendre
du président angolais
José
Edurardo Dos Santos
,
l’homme d’affaire Sindika Dokolo est connu pour sa collection
d’oeuvres d’art contemporain comprenant quelque 5 000 œuvres
signées des plus grands : William Kentridge, Mounir Fatmi,
Yinka Shonibare, Jean-Michel Basquiat, Marlene Dumas, etc. Inspiré
par son père, Augustin Dokolo Sanu qui était lui-même
collectionneur d’art classique africain, Sindika Dokolo avoue
entretenir avec ce dernier une « relation intime ». 

Ces
deux dernières années, il a d’ailleurs entrepris de partir à la
chasse des œuvres pillées dans son pays afin de les y rapatrier. 

Aidé par les marchands d’art Didier Claes et Tao Kerefoff, il
entend notamment
récupérer
les pièces qui se trouvaient au Musée de Dundo

et qui en ont disparu entre 1975 et 2002, pendant la guerre. Une
tâche d’autant plus difficile que, d’une part, on ignore le
nombre de pièces manquantes et que, d’autre part, chacune d’elle
peut valoir plusieurs centaines de milliers de dollars sur le marché
international.

Retour au
pays natal

« Le
moment est venu pour toutes les œuvres perdues de rentrer à la
maison, où elles pourront jouer pleinement leur rôle, un rôle qui
aidera à renforcer notre culture et notre savoir, qui permettra de
compléter notre patrimoine », soutient Dokolo qui entend
proposer aux galeristes « de bonne foi » une
indemnisation au prix d’achat… ou un petit entretien avec ses
avocats. La démarche, a priori, s’avère payante. 

Pour l’heure,
ce sont cinq œuvres d’art classique qui rejoindront bientôt leur
pays natal. Dernier achat en date, une statue Tchokwé de Lweji, une
reine Lunda, qui appartenait à l’artiste franco-américain Arman. 

Vendue d’abord à un collectionneur privée, elle vient tout juste
d’être acquise. 

Présentée à l’ambassade d’Angola avec un
masque tchokwé le 1
er
avril, en présence de Fernando Alvim, le directeur de la
Fondation
Sindika Dokolo
,
elle retrouvera bientôt son musée d’origine, comme 3 masques
Mwana Pwo et une autre statue masculine. 

L’un des masques a été
acquis, après tractations, pour 80 000 euros, alors qu’il peut en
valoir sur le marché quelque 600 000! 

La statue, acquise pour
la même somme, était elle proposée à un million d’euros…

Effet
dominos

La démarche
initiée par Sindika Dokolo est un véritable coup de pied dans la
fourmilière, puisque la plupart des œuvres actuellement vendues en
Occident ont des origines douteuses. Un « effet dominos » est
possible, même s’il reste souvent difficile de prouver la
provenance d’un objet volé quand ce dernier n’était pas archivé
– une situation fréquente en Afrique dont les marchands ont usé
et abusé. 
Dans le cas de cette reine, la chance a voulu qu’elle
soit photographiée et dûment renseignée par l’historienne de
l’art Marie-Louise Bastin, auteur notamment de Art décoratif
tshokwe : Museu Do Dundo (1961)

Silence
(gêné) dans les rangs

Gênés aux
entournures, les galeristes n’entendent pas commenter la démarche
de l’homme d’affaires-collectionneur récemment salué par la
médaille du mérite de la ville de Porto (Portugal) pour son
exposition d’art contemporain You love me, you love me not.
Concerné par ces tractations, un marchand connu de la rue Bonaparte
spécialisé en art classique africain a refusé de s’exprimer,
estimant l’affaire « réglée ». 
En vérité, il ne
s’agit que d’un début…