Cannabis : légalisation en cascade, industrie globale… Le Maroc toujours dans l’illicite
Brian Brequeville 09/11/2019 |
L’agence britannique Prohibition Partners a publié, le 6 novembre, son dernier rapport sur le cannabis. Ce dernier décrit le Maroc comme le plus grand fournisseur mondial de cannabis illicite, dans une industrie qui pèserait plus de 100 milliards de dollars à l’échelle mondiale d’ici 2024, soit le PIB marocain.
Le rapport “Global Cannabis report” de l’agence indépendante britannique, paru le 6 novembre, présente les évolutions du marché et des tendances mondiales concernant le nouvel or vert. Un secteur qui connaît un essor mondial sur tous les continents et dans lequel de plus en plus de barrières juridiques commencent à tomber, comme le rappelle d’entrée l’agence indépendante : “Le cannabis, à la fois médical et récréatif, est actuellement au centre d’une vague de légalisation mondiale.” A titre d’exemple, la France a, le 25 octobre dernier, voté pour une expérimentation de deux ans du cannabis thérapeutique à partir du premier semestre 2020.
En 2024, le médical l’emportera sur le récréatif
Le rapport fait ressortir des chiffres sur ce que pèserait l’industrie d’ici 2024. Dans sa globalité, cette dernière est estimée à 104 milliards de dollars d’ici cinq ans, dont près de 2,6 milliards à l’échelle africaine. “En 2024, le marché du cannabis médical (62,7 milliards de dollars) aura une valeur supérieure à celle du marché récréatif (41,2 milliards de dollars), avec des législations sur le cannabis à des fins médicales avançant à un rythme beaucoup plus rapide”, précise le rapport.
Selon un autre rapport du cabinet Grand View Research, le marché du cannabis médical au niveau mondial pourrait atteindre près de 55,8 milliards de dollars (près de 539 milliards de dirhams) à l’horizon 2025.
Afrique : peut mieux faire
Malgré une économie du cannabis en croissance et des perspectives lucratives pour l’ensemble des pays exploitants, l’Afrique est le continent qui a les perspectives les moins optimistes. Les raisons ? Un manque général d’infrastructures et de réglementation claire pour instaurer une industrie prospère.
Comme le signale le rapport de Prohibition Partners, “l’industrie africaine du cannabis est contradictoire en termes de production, légalité, et offre une possibilité de formaliser la légalisation du cannabis et sa réglementation. Certains des pays de la région, comme la Zambie et l’Ouganda, illustrent comment l’industrie survit dans une zone grise où la législation manque de clarté et où la culture est autorisée sans exiger l’octroi de toute forme de licence”. Le rapport poursuit : “L’Afrique manque d’infrastructures et d’installations nécessaires à la production de cannabis, et investir dans de nouveaux centres de production peut s’avérer coûteux et fastidieux.”
Des investisseurs à séduire
Cependant, l’or vert devient une manne très intéressante pour certains pays africains qui n’ont que peu de ressources internes, à l’instar du Lesotho, pays enclavé en République d’Afrique du Sud, ou encore le Zimbabwe. Le Lesotho, qui a légalisé la culture du cannabis il y a de cela deux ans, a accueilli de nombreuses entreprises pour exploiter l’or vert cultivé dans des serres situées en moyenne à plus de 1 400 mètres d’altitude.
Son climat favorable et une main-d’œuvre bon marché en font une terre promise pour de nombreux acteurs industriels à la conquête du marché africain. De plus, les licences d’exploitation délivrées aux entreprises désireuses de s’installer sont très peu onéreuses. Comme le rappelle le rapport, “au Lesotho, une licence de culture coûte 37 000 dollars”.
Le continent devient d’ailleurs une terre qui attire de grands champions du secteur comme Canopy Growth, la plus grande capitalisation boursière de l’industrie de la Weedtech (7,3 milliards de dollars), qui a misé sur l’Afrique du Sud pour conquérir le marché médical avec sa filiale Spectrum Therapeutics.
Quant aux perspectives et aux vagues de légalisation en Afrique, le rapport explique que “le Kenya pourrait faire de même dans un proche avenir. Le Parlement kényan a reçu plusieurs pétitions demandant la légalisation du cannabis. Des campagnes pour changer le statut juridique du cannabis au Malawi, au Maroc et au Ghana sont également en cours”.
Le Maroc, un potentiel record
Concernant le Maroc, le rapport n’est que très peu exhaustif mais explique cependant que le pays “demeure le plus grand fournisseur mondial de cannabis illicite doté de la plus imposante surface cultivable”. Dans un rapport de la même agence datant du printemps dernier, le marché du cannabis médical au Maroc pourrait s’élever à 28 millions de dollars dès la première année de légalisation (contre 916 millions de dollars pour le cannabis à usage récréatif). A titre de comparaison, les exportations automobiles marocaines se sont chiffrées en 2018 à 65 milliards de dirhams.