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État policier, brimades et terreur au Sahara Occidental occupé par le Maroc Hommage à Frank Ruddy, témoin pour l’Histoire

Luis Portillo Pasqual del Riquelme 27/10/2019
Un État policier et voyou. Ce sont les termes par lesquels Frank Ruddy (FR) a décrit le comportement de l’occupant marocain vis-à-vis de la population du territoire sahraoui illégalement envahi et occupé manu militari.

Tradotto da Fausto Giudice
Les Sahraouis ont résisté à l’occupation et à la colonisation marocaines par leur branche armée, le Front Polisario. Après 16 ans de guerre, le Plan de paix des Nations Unies a établi en 1991 un cessez-le-feu et la tenue d’un référendum d’autodétermination, supervisé par l’ONU, pour décider de l’intégration au Maroc ou de la création d’un Etat indépendant. La MINURSO (Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental), créée comme partie intégrante de l’armistice signé par le Maroc et le Front Polisario, devait avoir pour tâches principales d’assurer le maintien de la paix et de procéder au référendum d’autodétermination de la population autochtone du territoire sahraoui, un territoire non autonome en attendant sa décolonisation. A ce propos, Frank Ruddy a déclaré : « S’il y a jamais eu un costume sur mesure pour l’ONU, c’est bien celui-ci ».
Il convient de rappeler que le 30 avril 2019, le Conseil de sécurité a adopté la résolution S/RES/2468 (2019), prorogeant le mandat de la MINURSO pour une nouvelle période de six mois, la Russie et l’Afrique du Sud s’abstenant, car elles considéraient que le texte de la résolution était déséquilibré en faveur du Maroc.
Frank Ruddy fut « un diplomate fondamental dans l’histoire du Sahara occidental » (Carlos Ruiz Miguel) et une personne admirable à qui, à mon avis, l’hommage qu’il mérite n’a toujours pas été rendu publiquement à ce jour. L’important, cependant, c’est de reprendre le flambeau et de suivre l’exemple qu’il nous a donné. Juriste et ambassadeur des USA, il a été nommé en 1994 vice-président de la MINURSO, avec pour objectif final la tenue du référendum d’autodétermination.
Ce que Frank Ruddy a vu et vécu pendant son séjour à El Ayoun (capitale du Sahara Occidental) l’a profondément indigné, au point de le dénoncer personnellement au Secrétaire Général de l’ONU et, publiquement et officiellement, au Congrès usaméricain et au monde entier (son témoignage au Congrès a été largement rapporté dans les médias). Et il a consacré son temps et ses meilleurs efforts, depuis lors, à la diffusion et au soutien de la cause sahraouie partout dans le monde, de l’Alaska à l’Afrique du Sud.
Frank Ruddy a expliqué à l’auditoire que la Cour internationale de Justice (CIJ), dans son jugement du 16 octobre 1975, avait fait deux observations très importantes : 1) que le Maroc n’avait pas le droit de revendiquer la souveraineté sur le Sahara espagnol (désormais le Sahara occidental), et 2) que rien n’empêchait la tenue du référendum d’autodétermination prévu par l’ Espagne et que l’ONU devait surveiller celui-ci, conformément à la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 de l’Assemblée générale de l’ONU, sur la concession d’indépendance aux pays et peuples coloniaux.
Quelques jours après l’avis de la CIJ, le Maroc a envahi le Sahara Occidentsous couvert de la ” Marche verte “. Depuis lors, après 16 ans de guerre, des milliers de morts et la construction d’un mur miné de 2 700 km de long séparant le territoire et ses habitants, le Maroc occupe quatre-vingts pour cent du Sahara occidental, devenu le plus long conflit de l’histoire de l’ONU. Les dirigeants marocains et leurs puissants lobbies étaient occupés à répandre le grand mensonge que la CIJ avait décidé en faveur du Maroc.
Le référendum, initialement prévu pour 1992, a ensuite été reporté à 1994, date à laquelle F. Ruddy a été désigné pour le préparer, tâche principale de la MINURSO, comme l’atteste son nom. La tâche de l’ONU semblait assez simple – poursuit FR -, organiser un référendum où une question simple serait élucidée : indépendance ou intégration au Maroc. Mais la réalité n’allait pas être si simple.
Après plus de deux ans de retard, le processus d’inscription des électeurs a finalement commencé le 28 août 1994 : « À cette date, la MINURSO avait cessé d’être une opération gérée par l’ONU et était devenue un instrument utilisé par le Maroc pour contrôler l’identification des électeurs ». L’ONU a cédé au Maroc le contrôle du processus préparatoire du référendum. « Il n’y a pas d’autre façon de le dire, a souligné M. Ruddy, parce que le Maroc a décidé quand et où inscrire les électeurs, contrôlé l’entrée dans les bureaux d’inscription de l’ONU, et même décidé quels Sahraouis pouvaient s’inscrire ».
Les responsables marocains de l’inscription des électeurs ont noté avec effroi que les habitants autochtones du Sahara occidental voulaient l’indépendance et non l’intégration au Maroc (ce qu’ils avaient déjà fait dans le passé).
Les responsables marocains de l’inscription des électeurs étaient terrifiés à l’idée que les habitants autochtones du Sahara occidental voulaient l’indépendance et non l’intégration au Maroc (ce que les membres de la Mission de l’ONU qui s’étaient déjà rendus sur le territoire en mai 1975 avaient déjà constaté et clairement indiqué dans leur rapport au Conseil de sécurité, rendu public peu avant la décision de la CIJ et la ” marche verte “). Et les dirigeants marocains ont affronté cette dure réalité en reportant indéfiniment le référendum jusqu’à ce qu’il paraisse irréalisable et restant donc dans le territoire illégalement occupé.
F. Ruddy souligne qu’à la fin de sa première année au Sahara Occidental, il a reçu l’ordre de présenter ses rapports conjointement (!) au Secrétaire Général de l’ONU et au représentant du Maroc, ce qui était une reconnaissance claire que l’ONU n’avait pas de mission indépendante dans le territoire.
Le 25 janvier 1995, Frank Ruddy comparut devant la Chambre des représentants du Congrès des USA et a rendu publique sa dénonciation de l’inaction et de la complicité de la MINURSO avec l’occupant marocain pour torpiller et empêcher le référendum. Le texte de ce témoignage est disponible sur Internet (texte en français).
Ce que FR a exposé au Congrès sur l’action scandaleuse de l’ONU au Sahara Occidental n’était en aucun cas une évaluation personnelle et subjective. Au contraire, les abus commis par le Maroc contre la population sahraouie et l’incapacité de la MINURSO à les arrêter (comme c’est encore le cas aujourd’hui) étaient publics et notoires. « La MINURSO a été la risée des diplomates accrédités à Rabat », a affirmé le FR. Les ” casques bleus ” affectés à cette mission, comme les responsables de l’ONU, savaient que la MINURSO avait renoncé à organiser un référendum libre et équitable. La question du référendum a été une honte, comme Chris Hedges l’a dénoncé dans le New York Times (5 mars 1995) : « Le gouvernement marocain a été accusé d’ingérence dans le projet de l’ONU de tenir un référendum d’autodétermination au Sahara occidental ».
Ce que FR avait observé dans son poste à la MINURSO et dont il avait témoigné devant le Congrès a ensuite été vérifié par des ONG réputées, telles que Human Rights Watch et Amnesty International, et publié dans des journaux et magazines prestigieux (The New York Times, The Economist, Jeune Afrique, etc.).
Mais il semble que ce comportement de l’ONU (et des États qui la composent) ait malheureusement été une pratique assez ” habituelle ” jusqu’à présent, comme l’a récemment décrit en Espagne la journaliste María Antonia Sánchez-Vallejo (“Mirar para otro lado“, El País, 04/05/2019) ; bien que, ” évidemment “, sans mentionner le cas honteux et beaucoup plus proche du Sahara occidental -selon le diktat du blocus médiatique imposé sur la question de la décolonisation imminente de la dernière colonie en Afrique-, mais corroborant les pratiques de l’ONU dénoncées urbi et orbi par Frank Ruddy qui explicitait par quelques exemples le ” comportement mafieux ” des responsables marocains en territoire occupé, comme indiqué ci-dessous.
Brimades, vote frauduleux, impunité
Les Sahraouis qui s’étaient inscrits comme électeurs se sont plaints (auprès des employés arabophones qui en ont informé FR) que leurs amis et parents s’étaient inscrits pour voter, mais ne figuraient pas sur les listes électorales : les Marocains les avaient purement et simplement privés du droit de vote.
D’autres se plaignaient de ce que leurs amis ou parents étaient sur la liste pour s’inscrire sur les listes électorales, mais que les Marocains ne les y autorisaient pas : la police marocaine tenait à distance toute personne qui n’avait pas été autorisée par les autorités d’occupation. Les personnes qui venaient s’inscrire à une date donnée ne pouvaient même pas entrer dans le centre d’inscription ; seules les personnes portant tampon d’approbation marocain pouvaient le faire. De cette façon, les Marocains contrôlaient qui s’inscrivait pour voter. « Bienvenue dans l’Etat policier marocain du Sahara occidental ! , s’exclamait l’ambassadeur Frank Ruddy. Ce n’est pas ce que l’on pourrait attendre d’un processus parrainé et financé par l’ONU ! »
C’est précisément pour cette raison – expliquait FR – que « nous ne pouvions pas inviter les Sahraouis à remplir une demande de vote dans nos centres. Aucun Sahraoui n’a été autorisé à se trouver là où le gouvernement marocain ne voulait pas qu’il soit ». « Je ne me lasserai pas de le répéter : le Sahara occidental sous contrôle marocain est un État policier,… un État policier très efficace qui fonctionne à pleine capacité », dénonçait FR.
Certains Sahraouis qui ont rapporté ce que les Marocains leur faisaient ont demandé à l’ONU de les rechercher au cas où ls ” disparaîtraient “. Beaucoup ont dit qu’ils craignaient pour leur vie si les Marocains les voyaient parler aux gens de l’ONU. D’autres ont demandé aux gens de l’ONU d’agir comme s’ils ne les connaissaient pas s’ils les voyaient en dehors du centre de l’ONU.
« Dire qu’ils étaient terrifiés est un euphémisme. Leurs commentaires m’ont rappelé l’Afrique du Sud au début des années 1970, lorsque les Noirs vous parlaient ouvertement à l’ambassade des USA à Pretoria ou au Cap, parce qu’ils se sentaient en sécurité là-bas, mais dès qu’ils étaient sortis, ils faisaient mine de ne pas vous connaître, au cas où la police spéciale sud-africaine les verrait parler aux ‘perturbateurs étrangers’ ».
Un jour, l’officier de liaison marocain de la MINURSO, un certain Mohammed Azmi, s’est vanté publiquement dans un bar devant un groupe d’employés de la MINURSO qu’il était le seul à décider de poursuivre ou non l’identification le jour suivant. Et pour le prouver, il a pris son téléphone (il était presque minuit) et, devant tout le monde, a annulé les séances d’identification de la semaine suivante. FR s’est plaint de « ces actes de personnes machiavéliques qui font ce qui leur chante, en toute impunité par rapport à d’éventuelles sanctions de l’ONU et sans le moindre scrupule en faveur d’un référendum propre ni pour la dépense qu’ils occasionnent” (100 000 dollars/jour en 1995).
Tous ceux qui s’étaient enregistrés pour voter recevaient un reçu afin que, supposément, lorsque la liste de ceux qui pourraient finalement voter serait rendue publique, ils remettent ces reçus et reçoivent en échange un bulletin de vote. Mais – explique FR – ce qui se passait à El Ayoun (la capitale), c’est que les Sahraouis sortant des centres d’inscription des électeurs étaient obligés de remettre leurs reçus aux Marocains, ce qui permettrait aux personnes sans droit de vote (colons marocains) de présenter ces reçus et obtenir les bulletins correspondants (vote frauduleux, fraude électorale).
De toute évidence, la liberté de la presse a été une autre victime de l'”État policier” : pour informer la population qu’elle devait s’inscrire pour voter, l’ONU avait besoin d’espace dans les médias marocains (presse, radio). Mais pour acheter de l’espace média, il fallait obtenir une autorisation du gouvernement, une autorisation que « le Maroc a toujours refusée à l’ONU « (!). Attention, ce sont les déclarations d’un ambassadeur de la première puissance mondiale, comme il l’a dénoncé devant le Congrès US.
Et l’Ambassadeur Frank Ruddy a continué à donner des exemples concrets des actions impunies des Marocains : La veille du début du processus d’inscription sur les listes électorales, lors d’un dîner avec des Marocains et des employés de la MINURSO, le responsable marocain de la Mission a réprimandé le chef de la Mission de l’époque (Erik Jensen, qui agissait au nom de Yakoub Khan) et lui a ordonné de retirer tous les drapeaux de l’ONU du bâtiment (siège de l’ONU) où devait avoir lieu l’inscription électorale, sous peine d’annulation de cette liste d’électeurs. Ils ont donc retiré le drapeau de l’ONU même de la salle où devait avoir lieu la cérémonie d’ouverture ! La pusillanimité de l’ONU a permis aux Marocains de considérer les installations de l’ONU à El Ayoun, non pas comme un complexe extraterritorial de l’ONU (avec statut diplomatique), mais comme leur propriété. En fait, l’agent de marocain avec la MINURSO appelait le centre d’identification des électeurs de la MINURSO “chez moi” !
Pendant les jours de la session d’ouverture à El Ayoun, des soi-disant journalistes marocains ont photographié et filmé chaque minute de chaque jour, et ont pris des photos de chaque Sahraoui venu s’identifier. Ces « journalistes » se sont avérés être des agents de la sécurité marocaine, comme cela a été prouvé par la suite. Pas une seconde de ces heures de ces enregistrements n’a jamais été diffusée à la télévision marocaine.
Quelques semaines plus tard, on a découvert que les téléphones du quartier général de la MINURSO étaient sur écoute, les lignes locales et toutes les lignes internationales, et que les écoutes étaient acheminées vers une ligne marocaine locale. Ce fait a été réduit au silence (Chris Hedges l’a révélé plus tard dans The New York Times) et, pour éviter toute preuve qui pourrait impliquer l’ONU, l’employé de l’ONU qui avait installé les microphones cachés a été secrètement mis à l’écart. Le courrier avait été scruté régulièrement et les logements du personnel de la MINURSO avaient fait l’objet de fouilles fréquentes. « Big Brother nous écoutait et nous observait aussi », devait commenter F. Ruddy.
Au cours des semaines qui ont suivi, c’est le Maroc, et non l’ONU, qui a donné des instructions au personnel de la MINURSO sur ses horaires de travail et de vol. L’ONU faisait donc son propre travail lorsque les observateurs marocains y consentaient. De même, les Marocains ont imposé des restrictions sur l’utilisation des avions de l’ONU pour les vols entre El Ayoun et Tindouf, en les réservant exclusivement pour ramener les observateurs marocains chez eux et, en passant, démontrer que le processus était sous leur contrôle.
Bref, pendant le temps que FR a passé au Sahara occidental, « le Maroc a mené une campagne de terreur contre le peuple sahraoui, sans que le représentant désigné par Boutros-Ghali [Secrétaire général de l’ONU] ne pipe mot ». M. Ruddy dit qu’il n’a rien vécu de tel depuis qu’il avait vu le gouvernement sud-africain de l’apartheid agir contre les Sud-Africains noirs, lors de sa visite dans ce pays, au début des années 1970. « Ce n’est pas que le Maroc ait exercé une influence sur le processus de préparation du référendum, mais qu’il l’a contrôlé jusque dans les moindres détails, par exemple quels jours la MINURSO devait opérer ». Et il le dénonçait à nouveau : « Le Maroc a mis sur écoute les téléphones de l’ONU, intercepté son courrier et fouillé en toute impunité les habitations de ses employés. Plus important encore, les autorités marocaines ont privé partout les électeurs sahraouis de droit de vote et les ont remplacés par des infiltrés marocains ».
Inaction et complicité de l’ONU
Non seulement des personnes comme FR, mais aussi d’autres membres de la MINURSO ont dénoncé ces abus directement au représentant du Secrétaire général de l’ONU à la MINURSO, qui n’a pas défendu leur cause le moins du monde et les a renvoyés sans ménagement : « Il n’avait pas suffisamment de dignité ou d’arrestation pour affronter Mohammed Azmi, le gangster en chef du roi au Sahara occidental “, apostille Ruddy.
Avant de quitter la MINURSO, embarrassé par la situation décrite, FR a envoyé une note au Secrétaire général de l’ONU expliquant les fraudes, gaspillages et abus qu’il avait observés au sein de la Mission, et a proposé d’en discuter avec lui à son retour à New York. La réponse du Secrétaire général de l’ONU a été – littéralement – que ce que FR lui avait dit n’était « pas sérieux ». Mais plus tard, lorsque FR a témoigné devant le Congrès US et que son témoignage a atteint le monde entier, diffusé par les médias (il a fait la couverture de Jeune Afrique, par exemple), alors le Secrétaire général de l’ONU a été “horrifié, horrifié” d’entendre que de telles choses se passaient à la MINURSO, et s’est empressé de mettre sur l’affaire un inspecteur général flambant neuf, qui a vite fait d’enterrer la question (Frank Ruddy rapporte que même John Bolton a ri du rapport de cet inspecteur), blanchissant le comportement de la Mission …. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleurs des mondes possibles…..
En octobre 1995, Human Rights Watch a publié un rapport dévastateur de 38 pages sur la MINURSO, documentant les violations flagrantes des droits humains et la fraude électorale commises par le Maroc sous le nez même de la MINURSO. Mais « ni la Mission ni l’ONU n’ont rien fait », ajoute Ruddy.
Enfin, FR a été invité, puis ” désinvité “, à témoigner devant la Quatrième Commission de l’Assemblée générale de l’ONU, la Commission de décolonisation qui s’occupe du Sahara occidental, la dernière colonie en Afrique. FR considère comme un honneur que le Secrétaire général de l’ONU en personne, Boutros Ghali, soit intervenu personnellement pour empêcher la Quatrième Commission d’entendre ce que le FR avait à lui dire à propos de la MINURSO, FR étant la seule personne, en 40 ans de vie de cette commission, à avoir été empêchée de s’exprimer dans cette enceinte !
Au moins deux représentants spéciaux du Secrétaire général de l’ONU (Johannes Manz et Francesco Bastagli) ont démissionné de leur poste pour protester contre les manœuvres politiques marocaines. James Baker, l’architecte du Plan de paix auquel John Bolton avait contribué, a également démissionné.
Le S.G. Ban Ki-moon lui-même a eu beaucoup de difficultés avec le Maroc à la fin de son mandat… Et l’Ambassadeur Frank Ruddy n’a tenu qu’un an à son poste, ayant dû esquiver – comme il l’a lui-même révélé – quatre tentatives de corruption par les Marocains.
Dans ses mémoires en tant qu’ambassadeur des USA à l’ONU, Daniel Patrick Moynihan, sénateur du Parti démocrate, l’a dit très clairement. Il a reconnu qu’on lui avait confié la tâche d’empêcher le Sahara occidental de devenir un État indépendant, et il a dit avoir bien accompli cette tâche. Bien sûr, cela s’est produit pendant la guerre froide. Mais la guerre froide est finie depuis longtemps. Aujourd’hui, cependant, d’autres excuses et chantages sont utilisés dans le même but.
Malgré tout ce qui a été dit ici, FR a clairement exprimé sa position, il ne voulait pas de malentendus : il n’avait rien contre le Maroc – un allié important des USA – sauf en ce qui concernait le Sahara occidental : « Le problème que j’ai avec eux est qu’ils ont envahi le Sahara occidental aussi illégalement que l’Indonésie a envahi le Timor oriental, et qu’une fois là, le Maroc a eu un comportement indigne sans être freiné par la moindre crainte de [possibles] sanctions de notre département d’État ». « Il est triste pour moi, en tant qu’USAméricain, d’avoir vu dans les pays où j’ai servi, la Guinée équatoriale et le Sahara occidental, que notre gouvernement soutient les voyous qui dirigent ces endroits et ignore les gens BIEN qui y vivent et qui veulent et méritent mieux. (…) ».
Frank Ruddy a eu la lucidité et le courage de dire les choses clairement, en les appelant par leur nom. Et à une date si précoce. Aujourd’hui, en revanche, le silence imposé, la médiocrité morale et le cynisme courtisan règnent. Mais rien ne pourra arrêter l’avancée de la cause du peuple sahraoui ni la solidarité de tous les peuples qui l’accompagnent dans sa marche vers la liberté et l’indépendance.