Les abus contre Assange démontrent qu’il s’agit d’une affaire d’État
Jonathan Cook 05/06/2019 |
Il est très étonnant de voir le grand nombre de personnes bien informées et a priori intelligentes qui continuent à répéter au sujet de Julian Assange qu’il a fui des accusations de viol en Suède en se réfugiant dans l’ambassade d’Équateur à Londres.
Cette courte phrase comprend au moins trois erreurs factuelles. Et en réalité, pour croire de telles contrevérités, comme tant de gens le font, il faut avoir vécu toute la dernière décennie terré dans une grotte – ou, ce qui revient à peu près au même, avoir puisé ses informations sur Assange dans les médias dominants, y compris de soi-disant médias libéraux tels que le Guardian et la BBC [ou Mediapart].
Tout récemment, un éditorial du Guardian – la voix officielle du journal et probablement la partie la plus scrutée et pesée par les plus hauts responsables – a justement formulé une telle affirmation fausse :
« Il y a ensuite l’accusation de viol qui a été portée contre M. Assange en Suède, et qui l’a amené à chercher refuge dans l’ambassade d’Équateur. »
[Un éditorial du Monde a fait la même chose, toute honte bue :
« Julian Assange est un justiciable comme les autres. Ses démêlés avec la police ont commencé parce qu’il a refusé de se rendre à une convocation de la police suédoise qui souhaitait l’entendre après les plaintes de deux femmes pour agression sexuelle, au motif fantaisiste, à l’époque, qu’il craignait que la Suède ne le livre à la CIA. Il a eu tort de refuser de s’expliquer sur ces graves accusations. »]
Le fait que le Guardian [ou Le Monde], qui est censé être le principal défenseur des valeurs libérales dans les médias britanniques, puisse faire cette déclaration qui regorge d’erreurs après près d’une décennie de couverture médiatique sur Assange est tout simplement stupéfiant. Et qu’il puisse faire une telle déclaration quelques jours après que les États-Unis aient finalement admis qu’ils voulaient emprisonner Assange pour 175 ans sur la base d’accusations « d’espionnage » fabriquées de toutes pièces – toute personne qui ne fermait pas délibérément les yeux savait depuis toujours que les États-Unis s’apprêtaient à jouer cette main – est encore plus choquant.
La réalité est qu’Assange ne fait encore l’objet d’aucune accusation en Suède, encore moins d’une « accusation de viol ». Comme l’expliquait récemment Craig Murray, ancien ambassadeur du Royaume-Uni, le Guardian a induit ses lecteurs en erreur en prétendant faussement que la tentative d’un procureur suédois de faire extrader Assange – bien que cette décision n’ait pas reçu l’aval du pouvoir judiciaire suédois – équivalait à son arrestation pour viol. Ce n’est pas le cas.
En outre, Assange n’a pas cherché refuge dans l’ambassade d’Equateur pour échapper à l’enquête suédoise. Aucun État au monde n’accorde l’asile politique à un non-citoyen du pays pour lui permettre d’éviter un procès pour viol. L’asile a été accordé pour des motifs politiques. L’Équateur a, à juste titre, pris au sérieux les inquiétudes d’Assange selon lesquelles les États-Unis demanderaient son extradition et le jetteraient dans un cachot pour le restant de ses jours.
Bien sûr, il a été prouvé – encore une fois – de manière décisive par les récents développements que les inquiétudes d’Assange étaient parfaitement fondées.
Tradotto da Sayed Hasan