Sessions cite la Bible pour justifier la séparation d’enfants de migrants
La Presse, 14 juin 2018
Le
procureur général des États-Unis a justifié les séparations de familles de
sans-papiers en citant la Bible, brandissant la nécessité de faire respecter la
loi face à l'indignation de l'opposition démocrate et au malaise croissant dans
ses propres rangs républicains.
Jeff Sessions a annoncé début mai que tous les migrants sans papiers franchissant la frontière seraient arrêtés. |
«Entrer
illégalement aux États-Unis est un délit (...) Et avoir des enfants ne vous
protège pas», a-t-il poursuivi, rappelant avoir ordonné «que nos procureurs
lancent des poursuites contre 100% des entrées illégales» détectées à la
frontière mexicaine, dans le cadre de la politique de «tolérance zéro» de
Donald Trump.
Refusant
de commenter directement ces propos, la porte-parole de la Maison-Blanche,
Sarah Huckabee Sanders, a simplement avancé qu'il est «très biblique de faire
respecter la loi».
Depuis
octobre, plusieurs centaines d'enfants ont été séparés de leurs parents à la
frontière, y compris des familles venues demander l'asile.
Le rythme
s'est nettement accéléré depuis début mai, lorsque Jeff Sessions a annoncé que
tous les migrants sans papiers franchissant la frontière seraient arrêtés,
qu'ils soient accompagnés de mineurs ou pas. Or les enfants ne peuvent être
envoyés dans les «prisons» de leurs proches adultes, a-t-il réitéré jeudi, ce
qui conduit à leurs séparations.
Chez les
républicains du Congrès, le malaise était palpable jeudi.
Des gens
ont manifesté contre la politique migratoire de l'administration Trump, jeudi,
à Fort Wayne en Indiana, où Jeff Sessions a livré un discours.
«Nous ne
voulons pas que des enfants soient séparés de leurs parents», a déclaré leur
chef, Paul Ryan. «Nous estimons qu'il faut résoudre (cette situation) à travers
une loi sur l'immigration», a-t-il ajouté, alors que les républicains
travaillent à l'élaboration d'un texte plus large sur l'immigration qui
pourrait être présenté la semaine prochaine.
Un
amendement sera clarifié «pour s'assurer que les mineurs accompagnés
appréhendés à la frontière ne soient pas séparés de leurs parents ou tuteurs»,
a précisé un haut responsable républicain à la Chambre des représentants.
«Torture
psychologique»
Face au
tollé, le président Donald Trump et la Maison-Blanche martèlent que la
situation découle du blocage des démocrates face aux propositions de lois
républicaines sur l'immigration.
Faux, a
rétorqué jeudi la cheffe des démocrates à la Chambre, Nancy Pelosi. Cette
question pourrait être réglée «en une minute s'il y avait un effort sincère. Il
s'agit d'une action exécutive du ministre de la Justice. Elle peut être
modifiée juste comme ça», a-t-elle ajouté en claquant des doigts.
Admettant
qu'un projet de loi présenté par des sénateurs démocrates cette semaine pour
freiner cette pratique avait peu de chances d'être soutenu par la majorité
républicaine, plusieurs ont dit espérer que la «honte» pousserait
l'administration Trump à agir.
«Je ne
peux pas imaginer un acte plus cruel de la part du gouvernement (...) C'est de
la torture psychologique», a dénoncé Luis Gutierrez, élu à la Chambre.
Mardi,
Franklin Graham, un prédicateur évangéliste très influent auprès de cet
électorat important pour Donald Trump, a dit espérer que «quelque chose soit fait
bientôt pour régler cela».
«C'est
une honte, c'est terrible de voir des familles déchirées et je ne le soutiens
absolument pas», a-t-il lancé sur la chaîne Christian Broadcasting Network.