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Violences sexuelles en RDC : début du «procès de l’omerta» à Kavumu

Jeune Afrique – 09 novembre 2017
Le procès de 18 suspects – dont un élu local – pour le viol de 46 fillettes s’est ouvert ce jeudi à Kavumu, dans l’est de la République démocratique du Congo. Très attendu par la population et les ONG, il pourrait constituer un précédent pour « ébranler l’omerta et l’inertie judiciaire » autour des violences sexuelles dans la région du Sud-Kivu.
Kavumu est devenu le symbole des crimes sexuels à grande échelle qui ravagent l’est de la RDC. Entre 2013 et 2016, ce village du Sud-Kivu a été le théâtre violences inouïes. Des fillettes, parfois âgées d’à peine un an étaient enlevées puis violées. Les ravisseurs s’introduisaient dans les maisons de nuit pour enlever les jeunes filles, puis les violaient.

Quarante fillettes âgées de 8 mois à 12 ans

« Entre le début de l’année 2013 et le milieu de l’année 2016, plus de quarante jeunes filles, âgées de 8 mois à 12 ans, ont été enlevées et violées pendant la nuit », recense l’ONG Trial international, qui souligne que la majorité de ces enfants victimes ont été soignées par le Dr Denis Mukwege, à l’hôpital Panzi.
Le Procureur militaire de Kavumu s’est saisi de l’affaire en 2016 après plusieurs années de combat des familles des victimes et des ONG locales et internationales.  18 suspects, tous membres d’une milice sous les ordres du député provincial Frederic Batumike, ont été inculpés de crimes contre l’humanité. Ils sont aussi accusés de participation à un mouvement insurrectionnel et de viol.
Le député, dont l’immunité a été levée, est aussi accusé de l’assassinat en mars 2016 du défenseur des droits de l’homme Évariste Kasali, tué par balle chez lui.

« Ébranler l’inertie judiciaire »

« Juridiquement, la complexité consistait à prouver le caractère collectif des attaques », insiste l’ONG Trial international dans un communiqué daté du 2 novembre. « Pour constituer un crime contre l’humanité, celles-ci doivent émaner d’une organisation systématique. »Le procès qui s’ouvre aujourd’hui est l’un des rares de ce genre et pourrait constituer un précédent. Il se déroulera en audiences foraines jusqu’en fin novembre. « L’importance du procès Kavumu va bien au-delà des victimes et leurs familles », explique Philip Grant, le directeur de l’ONG. « Il ébranle toute l’omerta et l’inertie judiciaire qui entourent les violences sexuelles dans le Sud-Kivu. Que les autorités saisissent enfin ce dossier à bras-le-corps est un formidable pas en avant pour la justice congolaise. »