General

Des chefs utilisent les restes olympiques pour préparer des repas gratuits destinés aux pauvres de Rio

22 Août 2016

Cet article a été écrit par David Leveille et a été publié sur PRI.org le 18 août 2016. Il est ici republié dans le cadre d’un partage de contenu.

Les athlètes olympiques mangent bien plus que des barres énergétiques et des boissons protéinées. Imaginez quelques 250 tonnes de nourriture préparées pour sustenter plus de 11 000 athlètes concourant aux Jeux de Rio.

A l’instar des autres grands événements, la chaîne alimentaire aux Jeux Olympiques requiert une préparation et une logistique avancées et des estimations de la quantité d’aliments et d’ingrédients à avoir sous la main pour constituer des plats nourrissants.

Il y aura inévitablement un surplus, comme des caisses de fruits et légumes abîmés, ou des restes de pommes de terre et de riz.

Ainsi, un groupe international de chefs et d’activistes luttant contre la faim s’est constitué sous le nom de RefettoRio Gastromotiva (refettorio signifiant réfectoire en italien) pour sauver la nourriture olympique du gaspillage. Deux chefs, l’italien Massimo Bottura et le brésilien David Hertz, ont joint leurs efforts pour transformer l’excès de nourriture destinée au Village Olympique en repas pour les plus démunis. Ils affirment ainsi que leur objectif est « d’offrir nourriture et dignité aux personnes en situation de vulnérabilité sociale ».

Smoked banana peels substitute nicely for bacon in a RefettoRio dish of carbonara. Credit: Refettorio Gastromotiva

Les peaux de bananes fumées remplacent le bacon pour des pâtes carbonara concoctées par RefettoRio. Crédit: Refettorio Gastromotiva

Ces dernières semaines, les chefs de RefettoRio ont servi 108 dîners issus du surplus d’ingrédients donnés par l’entreprise de restauration en charge du Village Olympique. Aucun déchet ne se trouvait sur la table.

“RefettoRio ne travaille que des aliments sur le point d’être jetés… comme des fruits et légumes moches, ou des yaourts prêts à être mis à la poubelle dans les deux jours s’ils ne sont pas achetés », explique le chef Hertz.

Le restaurant s’est implanté dans le quartier de Lapa, près du Village Olympique.

“Il n’est pas du tout conçu comme un restaurant permanent », révèle Alexandra Forbes, une écrivaine culinaire qui a contribué à mettre en place RefettoRio. « Les clients sont différents. Pour la plupart d’entre eux, c’est la première fois qu’ils expérimentent un dîner complet préparé par un grand chef, et par ailleurs délicieux. Ils se sentent très privilégiés ». Un convive affirma au Times qu’il s’agissait du meilleur repas qu’il ait connu en 40 ans.

Les organisations locales qui ont servi les plus démunis ont trié sur le volet les clients issus de toutes les couches sociales du Brésil. Cela inclut des sans abris forcés de se nourrir dans les poubelles, des enfants des rues ou des mères de famille maltraitées.

“Ils n’ont pas l’habitude d’être traités avec autant d’attention et de respect”, explique Forbes, ajoutant qu”ils “apprécient tellement le repas qu’ils nous applaudissent et dansent parfois”.

Chaque jour, un chef différent prend les commandes. « Par exemple, l’autre jour le chef Massimo Bottura a fait des pâtes à la carbonara, préparées habituellement avec de la pancetta ou du bacon. Il a mis un peu de bacon mais a surtout utilisé des peaux de bananes grillées et mélangées avec du bacon, donnant ainsi un goût fumé. C’était délicieux ».

Créer des repas gastronomiques à partir d’une étrange collection d’ingrédients peut se révéler ardu. Mais comme l’assure Forbes, le véritable objectif pour l’équipe de chefs, boulangers et serveurs de RefettoRio est de « mettre fin aux préjugés contre les pauvres ou ceux qui sont en difficulté ».

Les femmes battues ou les personnes en proie à des problèmes d’addiction sont “des personnes comme les autres ; leur montrer qu’ils peuvent être traités avec respect et qu’ils peuvent bénéficier d’un grand repas est, je pense, nécessaire ».

RefettoRio essaie également d’envoyer un message quant au gaspillage alimentaire. Plus de 30% de la nourriture produite à travers le monde n’est jamais consommée, car gâchée lors de la récolte et du transport, ou jetée par les magasins et les clients. Pourtant, près de 800 millions de personnes à travers le monde s’endorment chaque soir le ventre vide, selon les chiffres des Nations Unies.

“Des événements tels que les Jeux Olympiques créent de gros gaspillages car vous devez nourrir tellement de monde qu’il est très difficile de calculer ce dont vous avez exactement besoin, il est inévitable d’avoir beaucoup de déchets. Mais personne n’avait vraiment pointé du doigt ce problème ».

Du moins jusqu’à maintenant.

ReffetoRio Gastromotiva souhaite s’appuyer sur son succès pour lancer un service de déjeuner payant. Les bénéfices aideront à compenser le coût des repas gratuits distribués le soir aux sans-abris. L’idée du RefettoRio sera également lancée à Montréal, Los Angeles et New York.