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Maroc: “Colors of Gnaoua”, le nouveau projet de Hassan Hajjaj

Par
Rebecca Chaouch, Mai 25 2016.

Le festival gnaoua et musiques du
monde à Essaouira a été l’occasion pour le célèbre photographe
Hassan Hajjaj et son ami maâlem Marouane Lbahja de présenter des
photos inédites des gardiens de l’histoire et du patrimoine
gnaoui.


Inaugurée le 13 mai à Dar Loubane, à
Essaouira, l’exposition «Colors of Gnaoua» vise avant
tout à préserver et transmettre cette culture ancestrale, alors que
les maâlems (maîtres chez les gnaouas, descendants des esclaves
venus d’Afrique de l’ouest) les plus âgés s’éteignent petit
à petit, souvent dans l’ombre et la précarité. Plus qu’un
simple travail artistique, les deux amis espèrent ainsi améliorer
les conditions de vie de la confrérie et laisser une trace aux
générations à venir.



Des œuvres, mais surtout un
travail de documentation



Ce projet, qui a nécessité plusieurs
mois de recherches, est le fruit d’une longue amitié, fraternité
et collaboration entre un artiste et un gnaoui qui n’est
«peut-être pas allé à l’école» mais qui se donne
corps et âme pour partager et protéger la richesse culturelle et
artistique des siens, en transmettant ce qu’il a appris.


Après avoir sillonné le Maroc à la
rencontre de maâlems de tous âges, Marouane Lbahja propose à
Hassan Hajjaj de les immortaliser en mettant en lumière leur rapport
singulier aux couleurs. Connu pour ses œuvres flashy et décalées,
le photographe marocain, installé au Royaume-Uni, ne s’est pas
fait prier pour rendre hommage à ces artistes qui ont bercé
son enfance. Étant eux-mêmes des artistes, les maâlems ont
l’habitude de monter sur scène, de prendre la pause,
explique-t-il, rappelant que ce sont eux les vraies stars du projet.
« Nous aimerions qu’ils aient plus de droits et que l’on se
souvienne d’eux pour longtemps. Si nous nous sommes concentrés sur
les gnaouas les plus âgés, c’est que certains sont déjà morts
depuis le début de la séance photo… »


Un S.O.S artistique


Les photos ont été présentées pour
la première fois au public durant
le festival gnaoua
, afin que les principaux concernés puissent
être présents. Mais «ce n’est que le début».
Beaucoup ne peuvent plus se déplacer, ne possèdent pas d’assurance
maladie, tombent malade, ont besoin d’un dentier ou de lunettes…
C’est pour leur venir en aide que Hassan Hajjaj et Marouane Lbahja
aimeraient aussi collecter des fonds, durant la prochaine
édition du festival par exemple, ne serait-ce que pour pouvoir
soigner quelques personnes par an.

«Un arbre, si on ne l’arrose pas,
perdra ses fruits. L’idée de ce projet est de mieux s’occuper de
notre arbre pour avoir de nouveaux fruits chaque année», explique
joliment et avec beaucoup d’émotion Marouane Lbahja. Car pour lui,
qui s’occupe des plus âgés au quotidien, qui les aide dans leur
toilette, qui leur prépare leurs repas, qui les réconcilie quand
ils se disputent, l’idée de leur disparition est très pénible à
vivre. D’autant plus que s’il devait additionner l’âge des
maâlems les plus âgés avec qui il travaille, le total atteindrait
les 700 ou 800 ans!


À la fin de l’exposition le 16 mai,
chaque maâlem a pu récupérer son propre portrait géant, des
portraits à la fois amusants et poignants qui devraient bientôt être
exposés ailleurs, «inch’allah».