Les migrants secourus par l’Aquarius vont rejoindre l’Espagne
EURACTIV,
12/06/2018
Les 629
migrants secourus au large de la Libye par le navire humanitaire vont rejoindre
l’Espagne. Une solution qui pourrait mettre un terme au bras de fer engagé ce
week-end entre l’Italie et Malte.
Après 36
heures de confusion autour du sort de ces migrants, les dirigeants
nationalistes corses avaient proposé mardi matin de recevoir le navire, juste
avant que les autorités italiennes ne dévoilent un nouveau plan.
Une
partie des migrants seront transbordés sur un bateau des garde-côtes italiens
et un bateau de la marine italienne, qui accompagneront l’Aquarius à Valence en
Espagne, d’après le plan communiqué tôt mardi matin par le centre de
coordination de Rome à SOS Méditerranée, a indiqué à l’AFP Laura Garel, porte-parole
de l’ONG française basée à Marseille et qui affrète l’Aquarius.
« On
n’a pas encore d’information sur l’heure du départ », a-t-elle ajouté,
précisant que le voyage des côtes maltaises jusqu’à Valence prendrait « au
moins 3 jours de navigation » pour 1.300 kilomètres. Vers 8 h mardi,
l’Aquarius était ravitaillé par un navire italien, a-t-elle précisé.
Le
navire, en attente entre Malte et l’Italie, qui refusaient toutes deux de
l’accueillir, transporte notamment sept femmes enceintes, 11 enfants en bas âge
et 123 mineurs isolés.
Lundi,
SOS Méditerranée avait dans un premier temps refusé la proposition espagnole.
Le navire, qui peut accueillir 500 passagers, aurait pu être en difficulté
selon ses dirigeants pour affronter des vagues hautes de 2 mètres avec 629
personnes à bord.
« Quelqu’un
qui dit non »
L’Aquarius
partira « dès que possible », avait assuré de son côté lundi soir le
nouveau ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini, également patron de la
Ligue (extrême droite). M. Salvini avait fait campagne avant les
législatives sur le thème de la fermeture des frontières aux migrants, et
prévenu qu’une fois au pouvoir, il ferait tout pour empêcher ces débarquements,
particulièrement lorsqu’ils sont le fait des ONG qui patrouillent au large de
la Libye.
« Sauver
des vies est un devoir, transformer l’Italie en un énorme camp de réfugiés,
non. L’Italie en a fini de courber l’échine et d’obéir, cette fois IL Y A
QUELQU’UN QUI DIT NON », a-t-il assuré sur Twitter.
Le
discours de fermeté de M. Salvini devrait toutefois être battu en brèche
par l’arrivée en Sicile, mardi ou mercredi, du navire « Diciotto »
appartenant aux gardes-côtes italiens et transportant 937 migrants.
L’Italie,
qui a vu quelque 700.000 migrants débarquer sur ses côtes depuis 2013, a
régulièrement accusé les Européens d’avoir détourné les yeux et de l’avoir
laissée seule face à la crise migratoire.
À Madrid,
dix jours après son arrivée au pouvoir, le socialiste Pedro Sanchez a, lui,
fait valoir qu’il était du devoir de l’Espagne de remplir ses
« engagements internationaux en matière de crise humanitaire ».
« J’ai donné des instructions pour que l’Espagne accueille le navire
Aquarius dans le port de Valence » (est), a-t-il annoncé lundi sur
Twitter.
« Pas
beaucoup de solidarité »
À Madrid,
le tout nouveau ministre des Affaires étrangères, Josep Borrell, a insisté sur
« la nécessité pour les Européens (…) de faire face de manière solidaire
et coordonnée à un problème qui est celui de tous, et non pas pendant un an
celui de la Grèce, l’année suivante celui de l’Italie ».
« L’Italie
a reçu un flux énorme de migrants et il n’y a pas eu jusqu’à présent beaucoup
de solidarité de la part des autres pays européens », a constaté
M. Borrell. Le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, a remercié
Madrid.
Au-delà
de la proposition des autorités corses, la France n’avait officiellement pas
pris position dans cette polémique. Interrogé mardi matin Jean-Baptiste
Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires
étrangères, a jugé que la position du président de l’exécutif corse Gilles
Simeoni était « facile », dans la mesure où il n’est « pas aux
responsabilités ».
« Que
dit le droit international ? Il faut aller vers le port le plus sûr et le plus
proche. Et on voit bien que la Corse n’est pas le port le plus sûr et le plus
proche », a ajouté le secrétaire d’État, interviewé sur Sud Radio,
estimant que « la France prenait plus que sa part au sens où elle est
engagée sur le théâtre libyen pour stabiliser la situation, au sens où nous
sommes engagés pour accueillir sur trois ans 10.000 personnes éligibles au
droit d’asile (…) pour leur éviter cette traversée de la mort ».