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Trump va-t-il faire donner la troupe contre la révolte aux USA ? Appels à mettre crosse en l’air

John Catalinotto 07/06/2020
5 juin – Il y a quatre jours, la Maison Blanche a demandé à l’armée US de se déployer dans les villes usaméricaines pour « dominer » les rues. Au cours des trois jours suivants, deux anciens présidents des Chefs d’état-major conjoints des armées (JCS) se sont prononcés contre ce déploiement. Tout comme l’ ancien et l’actuel secrétaire à la Défense de Trump, ce dernier sachant que cela risquait de le faire virer.

Tradotto da Fausto Giudice
Réagissant à la menace de Trump, au moins trois organisations anti-guerre de vétérans de l’armée ont appelé les membres des forces armées usaméricaines ou de la Garde nationale à refuser de se déployer contre les manifestants qui s’opposent au racisme.
Bien que le président ait cessé de diffuser ses menaces et que certaines troupes de la Garde nationale et fédérales aient été rappelées, elles pourraient encore être utilisées contre la population civile. Le tumulte qui règne au sein de l’appareil militaire à propos de la menace de Trump soulève deux questions essentielles : d’où vient cette opposition ? Que signifie la réticence des généraux pour le mouvement antiraciste ?
Pour répondre à la première : Les généraux et les amiraux craignent que l’utilisation de la force militaire contre la communauté afro-usaméricaine et ses alliés ne détruise la cohésion qui existe au sein des forces armées usaméricaines. Le Pentagone a construit une armée professionnelle – c’est-à-dire de non conscrits – au cours des 45 dernières années, depuis la débâcle du Vietnam. L’utilisation de troupes – qui sont composées à 40 % ou plus de personnes de couleur – contre la population civile pourrait détruire son moral et avoir un effet boomerang contre les hauts gradés.
La réticence des généraux indique la possibilité pour le mouvement d’atteindre les soldats de base. Affaiblir le moral des forces armées usaméricaines signifie affaiblir l’emprise mondiale des monopoles et des banques basées aux USA. Ce serait un pas en avant pour le peuple usaméricain et ceux du monde.
Dissidence d’en haut
Le secrétaire à la Défense Mark Esper, dont la rumeur disait qu’il était déjà sur le départ, a ouvertement contredit Trump le 4 juin. « L’option d’utiliser les forces actives dans un rôle de maintien de l’ordre ne devrait être utilisée qu’en dernier recours », a-t-il déclaré, « et seulement dans les situations les plus urgentes et les plus graves. Nous ne sommes pas dans l’une de ces situations actuellement. Je ne suis pas favorable à l’invocation de la loi sur l’insurrection » de 1807. (CNN)
Esper, normalement un dévot de Trump, ne s’exprimerait ainsi que s’il était déjà sous la pression de la hiérarchie militaire pour arrêter l’utilisation des troupes dans les villes. Des officiers supérieurs à la retraite, qui s’expriment plus librement sur les questions politiques que les officiers d’active, en ont donné une preuve supplémentaire. Parmi eux, les anciens présidents des JCS, l’amiral Mike Muller et le général Martin Dempsey, ainsi que l’ancien secrétaire à la Défense James Mattis, qui ont tous démoli Trump.
Personne ne doit se méprendre sur les motivations de ces officiers. Ils ont passé leur vie à servir les intérêts du militarisme et de l’impérialisme usaméricains. Ils ont ordonné aux troupes de participer à des guerres et des occupations illégales contre la Yougoslavie, l’Irak, l’Afghanistan et la Syrie et ont menacé l’Iran et le Venezuela. Cette fois, ils pensent que les ordres de Trump de déployer des troupes fédérales contre les manifestants antiracistes menacent leur armée.
Résistance d’en bas
L’organisation des vétérans de anti-guerre About Face: Veterans Against the War [Demi-tour : Vétérans contre la guerre] a fait circuler une pétition destinée aux membres de la Garde nationale qui dit « Nous vous demandons de défendre la vie des Noirs en vous retirant. Nous connaissons les conséquences que vous pourriez subir si vous désobéissez aux ordres. Beaucoup d’entre nous y ont fait face eux-mêmes ». Au 4 juin, quelque 700 vétérans avaient signé cet appel à refuser le service. ((source)
Veterans For Peace, une autre organisation de ce type, a fait circuler une déclaration appelant « tous les chefs et personnels militaires à refuser le déploiement. En tant qu’anciens combattants, nous connaissons les terribles conséquences de la participation à des actions moralement répréhensibles contre des communautés d’autres pays. Le moment est venu de refuser de participer à des ordres qui sont injustes ». (source)
Courage to Resist rapporte dans un article du 4 juin qu’elle « aide déjà actuellement les membres de la Garde nationale qui ont résisté aux ordres de Trump à attaquer violemment les gens dans les rues de Washington, D.C., protestant pacifiquement et légalement contre l’injustice raciale.
« Un membre de la Garde qui résiste aux ordres de Trump espérait à l’origine se joindre à des missions médicales d’assistance lors de catastrophes naturelles. Face à la situation actuelle, il a déclaré : « Je ne peux pas le faire. Même en regardant mon uniforme, je me sens mal d’être associé à tout cela, surtout après qu’une unité de la Garde nationale a tiré sur l’homme qui possédait ce magasin de barbecue », à Louisville, Kentucky.
Comment agissent les manifestants
Personne ne peut prédire avec certitude comment les soldats soumis à la discipline réagiront aux ordres du président. Le fait qu’il y ait une dissidence au sommet et qu’il y ait déjà une résistance de la part de certains militaires de base est un signe que la résistance est possible, même au sein d’une armée « professionnelle » et non conscrite.
Prenons l’exemple du dirigeant révolutionnaire africain, Amilcar Cabral, lorsqu’il fut confronté défi similaire. Cabral était à la tête de l’organisation qui a dirigé la guerre de libération contre le colonialisme portugais en Guinée-Bissau et au Cap-Vert.
En 1963, malgré ses tâches énormes dans la construction d’un mouvement de guérilla et la gouvernance de certaines parties de son pays, Cabral a pris le temps d’écrire un appel aux soldats conscrits portugais et aux officiers qui occupaient la Guinée-Bissau.
Son message, soigneusement expliqué, peut se résumer ainsi : (1) Les soldats portugais qui continuent à combattre les Africains dans l’intérêt des entreprises impérialistes peuvent s’attendre à ne jamais quitter l’Afrique vivants. (2) Ceux qui déserteront ou résisteront obtiendront le plein soutien et la protection du mouvement de libération.
Il a fallu encore 11 ans de combat, mais l’armée portugaise lasse de la guerre s’est finalement révoltée contre le gouvernement fasciste du Portugal, le renversant et mettant fin aux guerres contre les colonies africaines d’Angola, du Mozambique et de Guinée-Bissau.
Bien qu’il soit difficile de prédire ce qui va se passer aux USA, les événements de ces dernières semaines montrent que rien n’est impossible. Un mouvement qui encourage et défend les soldats qui résistent et lance un appel aux soldats, même s’il les affronte, peut faire la différence.