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La Corée du Sud débat de l’avortement

Lina
Sankari, Humanite, 24 Mai, 2018

Alors que
l’Irlande se prononce vendredi par référendum sur la l’interruption volontaire
de grossesse, la Cour constitutionnelle sud-coréenne se penche aujourd’hui sur
l’avenir de la loi nationale qui interdit toujours le recours à l’avortement.
Manifestation
contre la croisade contre l’avortement du gouvernement à Séoul en mars 2010.
Photo : Jung Yeon-Je/AFP

La Cour
constitutionnelle sud-coréenne se penche aujourd’hui sur l’avortement. Datée de
1953, la loi interdit toujours le recours à l’interruption volontaire de
grossesse (IVG) sauf en cas de viol, d’inceste, de maladie génétique ou de mise
en danger de la santé de la femme enceinte. L’avortement fait pourtant l’objet d’un
vif débat dans une société marquée par le poids des religions majoritaires à
savoir le christianisme (31,6%) et le bouddhisme (24,2%). En novembre, 235 000
personnes signaient ainsi une pétition afin de supprimer la législation en
vigueur. Le texte entendait « abolir le statut criminel de l’avortement et
autoriser l’usage de la pilule du lendemain ». Une bataille s’est
depuis engagée. L’archidiocèse de Séoul avait alors lancé sa propre pétition
contre l’IVG qui avait toutefois peiné à réunir les 15 000 signataires.

52 %
de la population se prononce en faveur d’une évolution de la légalisation
Six des
neufs juges de la Cour constitutionnelle, qui examinent le recours déposé par
un médecin poursuivi pour avoir réalisé près de 70 avortements, estiment d’ores
et déjà le texte actuel trop restrictif.  Une décision prise à la majorité
des deux-tiers est nécessaire pour déclarer la loi anticonstitutionnelle. Selon
un sondage daté de novembre, 52 % de la population se prononce en faveur
d’une évolution de la légalisation contre 36 % pour le maintien de
l’interdiction.
Les
femmes encourent un an de prison et 1500 euros d’amende
800 000
avortements seraient d’ailleurs pratiqués chaque année malgré l’interdiction,
selon l’association coréenne des obstétriciens et gynécologues. En plus de la
précarité des conditions dans lesquelles sont réalisées les IVG au cœur de la
onzième puissance mondiale, les femmes encourent un an de prison et 1500 euros
d’amende, les médecins deux années assorties de 1700 euros. En 2016, vingt-quatre
personnes ont ainsi été poursuivies en justice. Les centres qui pratiquent ces
avortements clandestins profitent en outre de l’illégalité de la pratique afin
de faire payer un prix exorbitant aux femmes. Selon les auteurs de la pétition
en faveur de la légalisation de l’IVG, « la Corée a un faible taux de
natalité (1,26 enfants par femme en 2017, l’un des plus faibles au monde, ndr),
mais une grossesse non désirée est une tragédie pour celles qui sont
concernées, les bébés et le pays. Il est injuste de faire des femmes les
seules responsables, comme c’est le cas avec la loi actuelle ».