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Tous connectés mais pas reliés ? Les paradoxes du numérique

15 Mai 2017


Le numérique est-il source de solutions pour relever les grands défis contemporains ou s’agit-il d’une « illusion » trompeuse qui nous enfonce discrètement dans l’individualisme ? Dans cette tribune, Nadia Ouddane rappelle que l’accès à internet reste très inégalitaire et craint que les « civic tech » ne conduisent à une « instrumentalisation du débat citoyen ». Rappelant que le temps humain n’est pas celui du numérique, elle défend un retour aux relations fondées sur la proximité, plutôt que sur la technologie. Billet d’opinion libre.

“Le monde s’est connecté mais pas pour autant relié” le faisait très justement remarquer Nicolas Hulot [1]. Constat ô combien pertinent dans un contexte où le lien social se délite et où l’on continue de véhiculer l’idée que le numérique apporte des solutions aux différents enjeux de notre société. À l’instar d’Ubik, roman éponyme de Philip K. Dick, le numérique envahit l’espace social et politique et devient central dans la résolution de problèmes. Tout est numérique, il détient la clé de la crise de la représentation démocratique, nous maintient “connecté à l’actualité du monde solidaire et durable” et réduira le chômage à coup d’algorithmes. Des Civic Tech qui veulent “hacker la démocratie” à la start-up sociale qui nous promet une mobilisation citoyenne en un clic de souris en passant par la sempiternelle plateforme de mise en relation : aucune strate sociale ou institutionnelle n’est épargnée par ce grand barnum numérique. Cette illusion de transformation de la société grâce aux outils numériques est bien entretenue et alimentée autant par les grands acteurs du numérique que par ces nouveaux entrepreneurs sociaux. Une perte de sens indéniable au détriment d’un projet de société pensé pour tous y compris la frange la plus fragile de notre société qui elle, ne l’est pas, connectée.