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Soudan du Sud: l’UA hausse le ton mais ne sanctionne pas

Paulina Zidi 02-07-2018
Samedi 30 juin, à la veille de l’arrivée des chefs d’Etat pour le 31e sommet de l’Union africaine (UA), une partie de la journée a été consacrée à la situation au Soudan du Sud. 

Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA, n’a pas mâché ses mots lors d’un Conseil de sécurité à huis clos. Signe que malgré un accord signé entre les deux camps, les dirigeants du continent se gardent bien de céder au triomphalisme.

Le Soudan du Sud était, avant même la signature de l’accord de cessez-le-feu, un des sujets incontournables de ce 31e sommet de l’Union africaine (UA) à Nouakchott. Cette crise, qui secoue le continent depuis de plusieurs années, est suivie de près par l’UA. L’organisation n’était d’ailleurs pas très loin lorsque l’accord entre les deux protagonistes, le président Salva Kiir et son opposant Riek Machar, a été signé à Khartoum, au Soudan, mercredi 27 juin.

L’obtention de ce cessez-le-feu a été saluée à Addis-Abeba, siège de l’organisation panafricaine. Paul Kagame, le président rwandais et président en exercice de l’UA, a reconnu en ouverture du sommet de Nouakchott dimanche 1er juillet au matin « une étape encourageante dans le processus de paix sud-soudanais ». Un optimisme de façade qui tranche avec les propos tenus dans les couloirs de l’UA, et notamment avec les mots employés quelques heures plus tôt par Moussa Faki Mahamat. Après les réjouissances sont finalement rapidement arrivées les mises en garde.

Menace de sanctions

Le président de la Commission de l’UA, informé de possibles violations du cessez-le-feu qui venait tout juste d’entrer en vigueur, a haussé le ton lors du Conseil de sécurité à huis clos. Il a souligné la gravité de la situation, que ce soit du point de vue humanitaire ou de la sécurité. Rappelant aussi que les précédents accords n’avaient jamais été respectés : « L’accord signé au mois de décembre a été violé, en février le processus de réhabilitation a été violé ». Le Soudan du Sud a alors mobilisé toute l’attention du Conseil de sécurité qui devait pourtant se pencher sur d’autres dossiers difficiles, comme la situation au Cameroun anglophone et en RDC.

En quelques minutes, la menace a été brandie : l’Union africaine se dit prête à prendre des mesures fortes contre ceux qui mettent en péril la paix dans le pays. Une déclaration qui vise sans détour l’opposant Riek Machar, mais aussi le président Salva Kiir qui n’est d’ailleurs pas présent ni représenté lors de ce rendez-vous en Mauritanie. Le siège du Soudan du Sud est resté vide à côté de celui du président soudanais, Omar el-Béchir, alors que le ministre nigérian des Affaires étrangères évoquait même l’idée d’un déploiement d’une force militaire de l’Union africaine pour cantonner les groupes armés et « vérifier qu’ils le restent bien ».

Option sur la table depuis six mois

Une menace de sanctions qui n’est pas nouvelle. Cela fait déjà plusieurs mois que l’option est sur la table de l’UA. Précisément depuis janvier 2018, lors du dernier sommet en Ethiopie, et alors que Salva Kiir était présent. « Le moment est venu d’imposer des sanctions à ceux qui font obstacle à la paix » au Soudan du Sud, avait alors déclaré Moussa Faki Mahamat.

Même élément de langage en mai dernier. Alors qu’une série de négociations se déroulaient une nouvelle fois en Ethiopie, le bras droit de Moussa Faki, son vice-président, Kwei Quartey, avait tenu à justifier la nouvelle position panafricaine : « Il serait injuste de prétendre que la décision de l’UA de prendre des mesures punitives contre ceux qui tuent ou contribuent chaque jour à tuer des gens est injustifiable ».

Mais si les partenaires internationaux du Soudan du Sud ont manifesté de plus en plus ouvertement ces derniers mois leur agacement à l’égard de ses dirigeants, aucun acte n’a encore été posé par l’organisation panafricaine. Et cela ne va être encore le cas lors de cette 31e session de l’assemblée ordinaire. Une nouvelle fois, il ne devrait pas y avoir d’annonce concrète de sanction.

A la place, l’organisation va mandater le Kenya et le Soudan pour mener des investigations sur la situation dans le pays, sur la violation éventuelle du cessez-le-feu. Les deux pays doivent faire un rapport au prochain sommet, prévu en janvier 2019, « des mesures punitives ciblées appropriées à prendre ».