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Royaume-Uni. Le poison russe utilisé contre Skripal fait deux nouvelles victimes

COURRIER INTERNATIONAL – PARIS 05/07/2018
L’agent innervant Novitchok, utilisé dans la tentative d’assassinat de l’ex-espion russe Sergueï Skripal et de sa fille Ioulia à Salisbury en mars dernier, a fait deux nouvelles victimes, “probablement accidentelles”, dans une ville voisine. La police antiterroriste s’est emparée de l’enquête.

Dawn Sturgess, 44 ans, a été la première à perdre soudainement connaissance et à être envoyée d’urgence à l’hôpital, samedi matin. Cinq heures plus tard, son compagnon Charlie Rowley, 45 ans, commençait lui aussi à se sentir mal puis à délirer, avant d’être hospitalisé à son tour. Le couple, originaire de la petite ville d’Amesbury, dans le sud-ouest de l’Angleterre, est depuis dans un état critique.
“L’incident a eu lieu à une quinzaine de kilomètres de Salisbury, où l’ancien espion russe Sergueï Skripal et sa fille Ioulia avaient été empoisonnés en mars avec l’agent innervant Novitchok”, observeSky News sur son site internet.
C’est cette proximité, et le fait que leurs symptômes étaient similaires, qui a éveillé les soupçons chez les médecins – le couple est soigné dans l’hôpital qui avait déjà accueilli les Skripal. Le laboratoire militaire de Porton Down a confirmé leurs craintes mercredi soir : ils ont bien été empoisonnés au Novitchok.
Des dizaines de policiers antiterroristes, travaillent depuis sur l’affaire pour tenter“d’établir comment et où le couple a-t-il été en contact avec le Novitchok et pourquoi il a refait surface aujourd’hui, plusieurs mois après l’attaque des Skripal”, expliqueThe Guardian.
Le sujet est hautement sensible en Grande-Bretagne, qui a accusé nommément la Russie d’être à l’origine de la tentative d’assassinat de l’ex-espion et de sa fille – des accusations inlassablement réfutées par Moscou.
Mais selon The Guardian, le chef de la police antiterroriste Neil Basu a assuré mercredi que “rien dans le passé de Sturgess ou Rowley ne suggère qu’ils aient pu être la cible d’une attaque délibérée – ils n’ont aucune connexion avec le monde du renseignement ou de l’espionnage”.
L’hypothèse la plus probable est donc celle d’une exposition “accidentelle” et c’est un problème de “santé publique” qui guetterait maintenant les autorités britanniques, selon le Times. Car cet empoisonnement “va susciter des interrogations sur les opérations de décontamination de Salisbury” réalisées après l’affaire Skripal.
Le Daily Telegraph anticipe lui aussi des heures difficiles pour les autorités, “qui devront répondre aux questions sur l’échec éventuel d’une décontamination qui a coûté des millions de livres”.
M. Basu, cité par le quotidien, a précisé qu’“il n’y avait pas de preuves de la présence de M. Rowley et Mme Sturgess sur des sites précédemment décontaminés, avant qu’ils ne tombent malades, mais une nouvelle opération de nettoyage va devoir être lancée” dans une ville déjà très marquée par l’affaire Skripal.
Le Times rappelle que le prince Charles et son épouse Camilla “s’étaient rendus à Salisbury il y a moins de quinze jours pour marquer la réouverture de la ville au commerce”, après des mois de fermeture des magasins et de perturbations dues aux opérations de décontamination.
Un habitant de Salisbury cité par le Daily Telegraph affirme “avoir peur. J’ai des enfants et j’aimerais savoir s’ils sont en danger. Mais les autorités ne nous disent rien”.