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Palestine. Le « cher Bibi » emprisonne Salah Hamouri pour trois mois de plus

Pierre
Barbancey, L’Humanite, 28 Juin, 2018

Benyamin
Netanyahou et son gouvernement d’extrême droite s’acharnent contre l’avocat
franco-palestinien, en détention administrative depuis déjà dix mois. Son
épouse, Elsa Hamouri, n’a toujours pas été reçue par Emmanuel Macron.

La
nouvelle est tombée. Sèche comme le claquement d’une porte de prison
: la détention administrative de
l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, qui devait se terminer ce 30 juin, a
été renouvelée pour trois mois sur ordre du ministre de la Défense israélien,
Avigdor Lieberman.
Salah
Hamouri a été arrêté le 23 août dernier au prétexte qu’une enquête était en
cours sur son appartenance supposée à une «
organisation ennemie». Le jeune Franco-Palestinien de
32 ans était supposé être libéré cinq jours plus tard, après avoir subi en
tout et pour tout un interrogatoire d’une vingtaine de minutes à son arrivée au
centre de police. Mis à l’isolement, il apprend par la suite que, pour les
besoins de l’enquête, il est maintenu en détention. Le 29 août, il est présenté
devant un juge de la Cour de Jérusalem, qui décide tout d’abord de le placer en
résidence surveillée pour vingt jours, sans qu’aucune des charges ne soit
révélée, contenues dans un «
dossier secret ». Le magistrat lui interdisait
également l’entrée à Jérusalem ainsi que toute sortie du pays pendant trois
mois. Et puis, l’ordre émanant du ministre de la Défense arrivait
: placer Salah Hamouri en
détention administrative. Soit six mois renouvelables au bon gré du ministère.
Et le
sinistre ministre ne s’en est pas privé
! Au mois de février, il annonçait que, cette fois,
il décidait l’emprisonnement de Salah Hamouri pour quatre mois. Hier, le
couperet tombait à nouveau
: trois mois.
Un déni
de justice
La
détention administrative est non seulement un déni de justice mais surtout une
véritable torture psychologique, puisque le prisonnier ne sait pas s’il sortira
ou s’il restera enfermé. Cette détention administrative est renouvelable autant
de fois que «
nécessaire». Se dire qu’il va sortir? Se préparer à ne pas quitter sa cellule? On sait combien la privation de liberté
n’est supportable que si un horizon d’élargissement peut se dessiner. Dans ce
cas, c’est impossible.
Autre
torture imposée par les autorités israéliennes
: Salah Hamouri ne peut pas
recevoir la visite de son épouse, Elsa (ni de son fils âgé de 2 ans),
puisque celle-ci est interdite de territoire israélien, passage obligé même si
elle veut se rendre en Palestine. Cela fera bientôt un an que Salah n’a pas vu
son enfant. Imagine-t-on la douleur, pour lui et sa famille, d’autant qu’aucune
charge ne lui est signifiée
?
Se pose
donc une question
: que font les autorités françaises? Il a été dit qu’à au moins deux reprises Emmanuel
Macron a soulevé le cas de Salah Hamouri devant son «
cher Bibi», comme il aime à appeler
Benyamin Netanyahou. Visiblement sans résultat. Comment ce dernier peut-il se
permettre d’humilier ainsi le président de la République française et la France
? Tout simplement parce que rien
de ce qu’entreprend Israël n’est soumis à critiques publiques et encore moins à
des mesures de rétorsion comme, par exemple, des sanctions d’État. D’ailleurs,
Emmanuel Macron n’a toujours pas daigné recevoir Elsa Hamouri, contrairement à
ce qui a été fait pour d’autres familles de Français emprisonnés à l’étranger.
L’État
français se tait
C’est un
véritable acharnement de la part de Benyamin Netanyahou et de son gouvernement
d’extrême droite. Ils n’ont qu’un mot d’ordre
: faire taire toutes les voix qui
s’élèvent contre leur politique coloniale d’occupation. Une répression qui
frappe aussi bien les Palestiniens que les Israéliens. À Gaza, on tue sous
prétexte du Hamas, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, on procède à des
assassinats ciblés et à des arrestations. Et en Israël même, des associations
de défense des droits de l’homme comme B’Tselem ou d’expression d’anciens
soldats qui dénoncent les exactions de l’armée dans les territoires occupés
comme Breaking the Silence sont l’objet d’attaques répétées. Des exactions
qu’on ne pourra plus filmer ni enregistrer par la grâce d’une nouvelle loi
israélienne liberticide.
Interrogé
par l’Humanité hier, le ministère français des Affaires étrangères n’a pas
souhaité réagir immédiatement «
compte tenu de la complexité de la situation de
M. Hamouri que nous suivons avec attention
», en attente d’«un retour détaillé» des diplomates sur place.