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Palestine. Ces firmes françaises qui participent à la colonisation

Pierre
Barbancey, L’Humanité, 14 Juin, 2018

Plusieurs
organisations, dont l’AFPS, la CGT, la CFDT et la Ligue des droits de l’homme,
pointent deux filiales d’entreprises publiques et Alstom.
Abbas
Momani / AFP

Un
nouveau rapport vient d’être publié sur la contribution d’entreprises
françaises à la colonisation israélienne des territoires palestiniens.
Plusieurs organisations (Association France Palestine Solidarité, CFDT, CGT,
FIDH, Al-Haq, LDH, Solidaires, Plateforme des ONG pour la Palestine) dénoncent
la participation de trois entreprises françaises, Egis et Systra, deux filiales
d’établissements publics (SNCF et RATP
; Caisse des dépôts et consignation), et Alstom,
dans la construction du tramway de la ville de Jérusalem.

Les deux
premières sont des sociétés d’ingénierie qui participent activement aux études
de ces nouvelles lignes et à la coordination des différents acteurs chargés de
leur mise en œuvre. Quant à Alstom, il s’agit déjà d’un acteur majeur de la
première phase de construction du tramway, et qui a répondu aux appels d’offres
de la seconde. Ce rapport est intéressant à plus d’un titre. D’abord, il montre
que, au-delà de ses déclarations, le gouvernement français n’agit pas
réellement pour mettre en échec la colonisation israélienne alors qu’il en a les
moyens. La résolution 2334 du 23 décembre 2016 du Conseil de Sécurité de
l’ONU «
demande à
tous les États (…) de faire une distinction, dans leurs échanges en la matière,
entre le territoire de l’État d’Israël et les territoires occupés depuis 1967
». Maryse Artiguelong,
vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme (LDH) et de la FIDH, fait
d’ailleurs remarquer que «
cette implication de deux filiales d’entreprises publiques
et d’Alstom paraît d’autant plus scandaleuse que ces entreprises sont soumises
à la loi sur le devoir de vigilance et ont pris des engagements pour le respect
des droits de l’homme, en signant le Pacte mondial des Nations unies
». Ces textes ne sont pas
facultatifs mais les engagent à ne pas se rendre complices de violations flagrantes
du droit international
!»
La
direction d’Alstom semble le subodorer puisque, selon nos informations, elle a
fait appel à un des consultants pour étudier la question et savoir si son
activité dans le cadre de la construction d’une ligne du tramway décidée par le
gouvernement israélien et s’étendant dans Jérusalem-Est serait de nature à être
considérée comme une atteinte aux droits de l’homme. Le rapport des consultants
n’a jamais été publié. Contacté par l’Humanité, Alstom n’avait pas réagi au
moment d’écrire ces lignes. Mais on peut remarquer qu’aucune des entités
françaises citées dans le rapport, et particulièrement celles dépendant d’une
entreprise publique, n’ont daigné répondre aux sollicitations des auteurs du
rapport.
Le
gouvernement français masque ses responsabilités
Bertrand
Heilbronn, président de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS), a
ainsi commenté l’enquête
: «Comment
comprendre l’inaction du gouvernement devant la participation d’acteurs publics
à la colonisation israélienne – totalement illégale – qu’il dénonce
par ailleurs de façon récurrente
? Il est temps de passer de la parole aux actes.» Il s’agit bien d’actes
politiques, alors que, dans le même temps, le gouvernement français masque ses
responsabilités en subventionnant une aide humanitaire à Gaza via la Jordanie
– aide certes nécessaire – mais qui masque le véritable problème
: la colonisation. «Par leur participation à la
construction du réseau de tramways qui relie Jérusalem-Ouest aux colonies
israéliennes implantées dans Jérusalem-Est, palestinienne, les sociétés visées
et leurs actionnaires publics contribuent directement à la perpétuation et au
développement de la politique de colonisation israélienne, en dépit du droit
international
», notent les organisations à l’origine du rapport.