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Les pays de l’Est pourraient payer pour éviter d’accueillir des réfugiés

Aline
Robert, EURACTIV, 28 giu 2018

Longuement
débattue mais autrefois taboue, l’idée de faire payer les pays refusant
d’accueillir les réfugiés semble la seule porte de sortie face au blocage de la
répartition des migrants. 
Des
membres de l’ONG “SOS Méditérannée” du bateau “Aquarius”
aidant une femme durant une opération pour secourir plus de 250 migrants à
environ 50 km des côtes libyennes, 21 avril 2018 [EPA-EFE]

Bloqué
depuis trois ans, attaqué sans succès devant la Cour de justice de l’Union
européenne, le principe de répartition de migrants par quotas dans les
différents pays de l’UE ne fonctionne pas.
La
ministre des Affaires européennes française, Nathalie Loiseau, l’a reconnu
jeudi, en marge du Conseil européen, et assuré qu’il fallait trouver d’autres
solutions. « On ne forcera personne. Mais il faut trouver un moyen de
solidarité avec l’Italie notamment », assure la ministre.
L’idée
sous-jacente est simple : « on peut discuter les modalités de la
solidarité, pas le principe », martèle l’Élysée.
Depuis la
mise en place du système, la plupart des pays ont joué le jeu et accueilli des
migrants, même si certains en accueillent plus que d’autres.
En
revanche, les pays de Visegrad n’en ont accueilli quasiment aucun. « On ne
peut pas faire partie de l’Union européenne et considérer que la question des
migrations ne vous regarde pas », ajoute Nathalie Loiseau.
L’idée
d’une contribution financière, plutôt que d’un véritable accueil, est certes
une défaite pour l’UE et surtout pour la Commission Juncker à l’origine de la
proposition, mais la proposition, qui est aussi poussée par l’Allemagne,
pourrait apaiser le groupe de Visegrad qui s’arqueboute sur ce refus depuis
trois ans.
L’idée de
fond serait d’autoriser la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la
Slovaquie à contribuer au financement de l’accueil des réfugiés dans les pays
d’accueil, soit la Grèce, l’Italie et l’Espagne, qui pourraient mettre en place
des centres d’accueil fermés de migrants « dans l’esprit des
hotspots ».
La proposition
répond aussi à un discours très dur des pays d’Europe de l’Est, qui se traduit
dans le discours du président polonais du Conseil de l’UE, Donald Tusk. Lequel
a soutenu le projet d’organiser des centres de détention fermés en dehors de
l’UE, dans les Balkans, pour les migrants.
Une idée
qui choque la France notamment, qui envisage en revanche des centres fermés au
sud de la Méditerranée, pour éviter le danger de la traversée. Les camps en
Afrique représentent des symboles tout aussi choquants pour les ONG qui
dénoncent depuis des mois la corruption et les pratiques de la Libye envers les
migrants, où l’esclavage est répandu.
Multiplication
des accords bilatéraux
Le
durcissement de la politique européenne envers les migrants devrait aussi se
traduire par une autre voie, juridique celle là, avec la multiplication des
accords bilatéraux entre les pays européens concernant les migrants illégaux.
L’aile
droite de la coalition allemande pousse en effet pour que l’Allemagne signe des
accord bilatéraux, surtout avec l’Italie, mais aussi avec les autres pays, afin
de renvoyer les candidats à la migration « dublinés », c’est à dire
enregistrés, dans le premier pays européen sur lequel ils sont entrés.
La France
a de longue date signé un accord de ce type avec l’Italie, qui lui permet à la
fois de refouler les candidats à la migration en provenance d’Italie, et de
renvoyer ceux qui seraient parvenus à pénétrer sur le sol français.
« L’Italie n’a pas l’intention de revenir là-dessus, cet accord permet
d’éviter un appel d’air » assure-t-on côté français, tout en assurant que
la France est prête à signer de tels accords avec l’Allemagne.
L’article 36
du règlement de Dublin
prévoit que les États membres puissent
s’organiser entre eux à leur guise pour appliquer ledit règlement.
L’article
36 du règlement de Dublin
Arrangements
administratifs
1. Les
États membres peuvent établir entre eux, sur une base bilatérale, des
arrangements administratifs relatifs aux modalités pratiques de mise en œuvre
du présent règlement afin d’en faciliter l’application et d’en accroître
l’efficacité. Ces arrangements peuvent porter sur: a) des échanges d’officiers
de liaison; b) une simplification des procédures et un raccourcissement des
délais applicables à la transmission et à l’examen des requêtes aux fins de
prise en charge ou de reprise en charge des demandeurs.
2. Les
États membres peuvent également maintenir les arrangements administratifs
conclus au titre du règlement (CE) no 343/2003. Dans la mesure où de tels
arrangements ne sont pas compatibles avec le présent règlement, les États
membres concernés modifient les arrangements de manière à supprimer toute
incompatibilité détectée.
3. Avant
de conclure ou de modifier un arrangement visé au paragraphe 1, point b), les
États membres concernés consultent la Commission en ce qui concerne la
compatibilité dudit arrangement avec le présent règlement.
4. Si la
Commission estime qu’un arrangement visé au paragraphe 1, point b), est
incompatible avec le présent règlement, elle notifie ce fait aux États membres
concernés dans un délai raisonnable. Les États membres prennent toutes les
mesures appropriées pour modifier l’arrangement concerné dans un délai
raisonnable de manière à supprimer toute incompatibilité détectée.
5. Les
États membres notifient à la Commission tous les arrangements visés au
paragraphe 1, ainsi que leur dénonciation ou leur modification éventuelle.