L’Autorité de Ramallah interdit violemment toute manifestation de soutien à Gaza
Yara
Hawari, Chronique de Palestine, 16 juin 2018
La police
de l’Autorité palestinienne a utilisé des gaz lacrymogènes, des grenades
assourdissantes et des matraques pour disperser les manifestants qui
dénonçaient les sanctions contre la bande de Gaza.
L'Autorité
palestinienne et ses sbires se comportent comme une dictature, tout en étant à
la botte de l'occupant israélien - Photo : Amnesty |
Mercredi soir à Ramallah, les gens se sont à nouveau mobilisés dans le cadre d’une nouvelle campagne appelant l’Autorité Palestinienne (AP) à lever les sanctions qu’elle a imposées à Gaza.
Les
sanctions comprennent la réduction de
plus de 30% des salaires des employés du gouvernement et la retraite
anticipée forcée de près d’un tiers des employés de l’Autorité palestinienne à
Gaza. Mesures
radicales en elles-mêmes, ces sanctions sont rendues encore plus
brutales dans le contexte du siège
israélien imposé sur Gaza, qui ne produit que chômage et
pauvreté.
Les
manifestants voient les sanctions comme un moyen d’accentuer le blocus de Gaza
et de pratiquer une punition
collective. Ils rejettent également la forte division
politique et la lutte de pouvoir entre le Fatah et le Hamas.
La
manifestation de mercredi a eu lieu à la suite d’une manifestation similaire
qui s’était déroulée dimanche à Ramallah et avait attiré près de deux mille
personnes. Il y avait eu très peu de violence dans la manifestation de
dimanche, mais ce qui s’est passé mercredi soir était une autre histoire.
Mardi, un
jour avant la manifestation prévue, l’AP a annoncé l’interdiction de toutes les
formes de manifestations jusqu’à la fin de l’Aïd al-Fitr, la fête musulmane qui
marque la fin du mois de Ramadan. Cela a permis à l’Autorité palestinienne de
traiter la manifestation prévue d’ « illégale » et d’organiser ses
forces pour la disperser.
Avant la
manifestation, les rues de Ramallah étaient remplies de policiers. Les agents
ont été placés dans des endroits stratégiques dans l’objectif évident
d’intimider les militants.
Peu de
temps après que les manifestants ont commencé à se rassembler, armés de rien
d’autre que des affiches disant « Gaza nous unit », les forces de
répression ont commencé à tirer des gaz lacrymogènes et à lancer des grenades
assourdissantes. Des policiers lourdement armés en tenue anti-émeute ont
également brandi des matraques et utilisé des pistolets Taser contre les
manifestants non armés. À la fin de la nuit, plus de 40 manifestants avaient
été arrêtés. Les manifestants détenus ont été tabassés dans des véhicules de
police et des postes de police. La plupart des détenus ont été libérés
rapidement, mais tous ont été blessés.
La pire
des violences n’est pas venue de la police, mais des voyous payés par le Fatah,
connus familièrement sous le nom de « baltajiyeh », qui se sont
joints à la police pour battre et intimider les manifestants. Identifiables par
les casquettes blanches qu’ils portaient, ces hommes étaient incroyablement
violents envers les manifestants et ont harcelé sexuellement et agressé
plusieurs femmes dans la foule.
L’intimidation
des militants en Palestine, en particulier ceux qui critiquent l’AP, n’est pas
nouvelle. De nombreuses manifestations similaires ont été réprimées
par le passé, et ce qui s’est passé mercredi soir ne devrait surprendre
personne. Les dirigeants qui ont commandité l’attaque des manifestants
pacifiques cette semaine étouffent l’opposition politique depuis des années.
Ils a également échoué à tenir des élections démocratiques depuis plus d’une
décennie.
Pourtant,
malgré tout son autoritarisme et son agressivité
envers son propre peuple, l’AP a toujours le soutien de la dite
communauté internationale et ses forces de sécurité sont célébrées
pour leur efficacité. En 2006, les forces de sécurité de l’AP ont été réformées
et recyclées dans le cadre d’une initiative menée par le Coordinateur de la
sécurité des États-Unis (USSC) et le Bureau de coordination de l’Union
européenne pour le soutien de la police palestinienne (EUPOL COPPS). Ils ont
depuis été congratulés par divers politiciens israéliens pour leur coopération
et leur aide dans la prévention des soi-disant « activités
terroristes ».
Après la
manifestation de dimanche dernier, l’Autorité palestinienne a affirmé que la
campagne en cours à Ramallah contre les sanctions de Gaza était organisée
directement par le Hamas. Cependant, ce n’est clairement pas le cas. La
campagne contre les sanctions contre Gaza est un mouvement populaire non
partisan. Des Palestiniens de tous les milieux et de toutes les affiliations
politiques se sont rassemblés mercredi à Ramallah pour protester.
L’objectif
principal de la campagne est de lever les sanctions qui exacerbent
les souffrances causées par le siège israélien. Mais elle tente également de
contester la fragmentation du peuple palestinien, en soulignant qu’il ne fait
qu’un – de Gaza à Haïfa en passant par Ramallah – et que son seul adversaire
sont les colonies israéliennes et tous les mécanismes de contrôle.
Ce qui
est plus clair que jamais aujourd’hui, c’est que l’AP a perdu toute
légitimité. En tant que sous-produit d’Oslo, elle reste un mécanisme
qui vise à maintenir le peuple palestinien sous occupation et dans la
soumission dans les territoires de 1967. Elle ne représente pas les réfugiés
palestiniens dans les autres pays ou les Palestiniens vivant dans les
territoires de 1948.
Mais la
communauté internationale continue son partenariat avec l’AP et, pire encore,
continue de financer sa brutalité
envers son propre peuple.
Le début
des manifestations de la Grande marche
de retour à Gaza il y a plusieurs mois a montré la renaissance de
l’organisation populaire palestinienne. En effet, de Haïfa à Ramallah, Gaza
unit le peuple palestinien !