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Australie : le cardinal Pell sera jugé pour agressions sexuelles

Le Figaro,
01/05/2018

Le haut
responsable du Vatican, rentré en Australie en juillet dernier pour se défendre
d’accusations d’agressions sexuelles, sera jugé par le tribunal de Melbourne à
une date encore inconnue pour des chefs d’accusation «multiples». Il plaide non
coupable. De son côté, le Saint-Siège «prend note» de la décision de la
justice.
Le prélat
australien plaide non-coupable des charges d’agressions sexuelles pesant contre
lui. WILLIAM WEST/AFP
Il s’agit
du plus haut responsable du Vatican à être poursuivi pour agressions sexuelles.
Mis en examen fin juin 2017 pour des délits d’agressions sexuelles anciennes,
le cardinal australien George Pell sera finalement jugé pour de «multiples»
chefs d’inculpation. La juge Belinda Wallington s’est déclarée «convaincue»
qu’il y avait suffisamment de preuves pour que le prélat comparaisse pour des
chefs d’accusation «multiples», tout en abandonnant plus de la moitié des
accusations.
 
Mgr
George Pell est resté impassible à l’annonce de la décision du tribunal de
Melbourne. Une audience procédurale est prévue ce mercredi pour discuter de la
date du procès. Le prélat de 76 ans a été laissé en liberté sous caution, avec
interdiction de quitter l’Australie. «Le Saint-Siège a pris note de la décision
des autorités judiciaires concernant Son Eminence le cardinal George Pell», a
réagi le Vatican.
Comme
depuis le début de cette affaire, il a annoncé qu’il plaiderait «non coupable»
des charges qui pèsent contre lui. «Le cardinal George Pell a toujours
pleinement coopéré avec la police de Victoria et toujours fermement affirmé son
innocence», peut-on lire dans un communiqué
attribué au prélat et diffusé par l’archidiocèse de Sydney. «Il est
volontairement rentré en Australie pour faire face aux accusations. Il se
défendra des chefs d’accusation qui demeurent».
Ordonné
prêtre en 1966 à Rome avant de revenir en Australie en 1971, l’ecclésiastique a
été nommé archevêque de Melbourne en 1996, puis de Sydney en 2001. En 2014, il
a été choisi par le pape François pour mettre davantage de transparence dans
les finances du Vatican. Haut placé dans la hiérarchie du Vatican, il était
aussi l’un des plus proches conseillers du pontife.
Mis en
congé de ses fonctions, il était rentré en Australie en juillet dernier pour se
défendre des accusations d’agressions sexuelles qui pèsent contre lui – dont la
nature exacte n’a pas été dévoilée par les autorités. «Ce congé reste valide»,
a précisé le Vatican dans son communiqué du 1er mai
«Les gens
doivent être et sont égaux devant la loi»
L’avocate
Lisa Flynn, qui représente par ailleurs des centaines de victimes d’agressions
sexuelles dans d’autres affaires de demandes de dédommagements au civil en
Australie, a estimé que la décision du tribunal prouvait que «les gens doivent
être et sont égaux devant la loi». Elle a également salué «une étape
prometteuse pour les victimes d’agression sexuelle.»
L’annonce
de l’inculpation du prélat avait coïncidé avec la fin d’une longue enquête
nationale portant sur les réponses institutionnelles apportées en Australie aux
abus sexuels commis sur des enfants. Le gouvernement avait ordonné son
ouverture en 2012 après une décennie de pressions de la part des victimes.
Le
cardinal Pell avait été entendu trois fois dans ce cadre et avait reconnu avoir
«failli» dans sa gestion des prêtres pédophiles dans l’État de Victoria dans
les années 1970. La commission avait affirmé en février 2017 que sept pour cent
des religieux catholiques australiens avaient fait l’objet d’accusations d’abus
sexuels sur des enfants entre 1950 et 2010 sans que les soupçons ne débouchent
sur des investigations.
Dans
plusieurs pays du monde, l’Église catholique a été secouée par des affaires
d’agressions sexuelles, souvent sur mineurs. Démission en 2010 de l’évêque de
Bruges, en Belgique, destitution en 1995 et 2004 de deux prélats autrichiens
puis en 2013 du nonce en République dominicaine, abus sur des dizaines de
milliers de mineurs depuis plusieurs décennies aux Pays-Bas et en Irlande…
En
France, en 2016, l’affaire du père Bernard Preynat, soupçonné d’avoir abusé de
quelque 70 scouts, a ainsi écorné l’image du cardinal Philippe Barbarin,
archevêque de Lyon, visé par des plaintes pour non-dénonciation. Il sera jugé en
janvier 2019
. Début juin 2017, l’ancien évêque d’Orléans, Mgr André
Fort, a été mis en examen pour n’avoir pas dénoncé des faits présumés
d’attouchements sexuels sur mineurs. Avant lui, Mgr Pierre Pican, évêque de
Bayeux, avait été condamné à trois mois d’emprisonnement avec sursis pour
non-dénonciation.
Le
Vatican a annoncé en février avoir nommé neuf nouveaux membres au sein de la
commission anti-pédophilie, après le bilan controversé des activités de ce
précédent groupe d’experts voulu par le pape François. Le pape a par ailleurs
reconnu le mois dernier avoir commis «de graves erreurs» d’appréciation de la
situation au Chili, où environ 80 membres du clergé ont été impliqués dans une
série d’affaires ces dernières années.