De Londres à Paris, regards sur l’islamophobie
Kawtar
Najib, Peter Hopkins, The Conversation, 17 avril 2018
La montée
de l’islamophobie en France et au Royaume-Uni s’est intensifiée ces dernières
années, notamment après les différents attentats terroristes qu’ont subi les
deux pays, telles que l’attaque contre Charlie Hebdo
2015 dans la capitale française et l’attaque du
pont de Londres en 2017.
de l’islamophobie en France et au Royaume-Uni s’est intensifiée ces dernières
années, notamment après les différents attentats terroristes qu’ont subi les
deux pays, telles que l’attaque contre Charlie Hebdo
2015 dans la capitale française et l’attaque du
pont de Londres en 2017.
Plusieurs
dizaines de femmes sont rassemblées le 2 avril 2011
place du Capitole à
Toulouse, pour protester contre “toutes les formes
de stigmatisation des
musulmans en France. Remy Gabalda/AFP |
Ces
attaques ont conduit la première ministre britannique, Theresa May ainsi que le
Président de la République Française Emmanuel Macron à se rencontrer en janvier
2018 afin de réfléchir sur une action conjointe de contre-terrorisme
notamment à l’encontre des sites
Internet de réseaux de radicalisation.
Sur
plusieurs plans, la France et le Royaume-Uni font face à des défis similaires.
Situés en Europe de l’Ouest, les deux pays comportent une proportion non
négligeable de personnes de confession musulmane.
plusieurs plans, la France et le Royaume-Uni font face à des défis similaires.
Situés en Europe de l’Ouest, les deux pays comportent une proportion non
négligeable de personnes de confession musulmane.
Le Pew
Research Center estime cette population à 5,7 millions
de personnes en France, malgré le fait que les statistiques
ethniques et religieuses ne soient pas disponibles dans ce pays. Au
Royaume-Uni, le Muslim Council of Britain, organisation chapeautant les
associations et institutions musulmanes compte 2,7 millions
de personnes.
Research Center estime cette population à 5,7 millions
de personnes en France, malgré le fait que les statistiques
ethniques et religieuses ne soient pas disponibles dans ce pays. Au
Royaume-Uni, le Muslim Council of Britain, organisation chapeautant les
associations et institutions musulmanes compte 2,7 millions
de personnes.
Cependant
notre recherche montre que le phénomène d’islamophobie diffère entre les deux
pays.
notre recherche montre que le phénomène d’islamophobie diffère entre les deux
pays.
Les lieux
de l’islamophobie
de l’islamophobie
Pour
tenter de comprendre la complexité de
l’islamophobie, notre recherche
portant sur les actes antimusulmans se concentrent avant tout sur les deux
importantes capitales européennes de Paris et Londres.
tenter de comprendre la complexité de
l’islamophobie, notre recherche
portant sur les actes antimusulmans se concentrent avant tout sur les deux
importantes capitales européennes de Paris et Londres.
Des
données recueillies en 2015 grâce au travail des associations Collectif contre l’islamophobie en France
(CCIF) et Tell MAMA au Royaume-Uni
nous éclairent ainsi davantage sur ce phénomène et sa diversité.
données recueillies en 2015 grâce au travail des associations Collectif contre l’islamophobie en France
(CCIF) et Tell MAMA au Royaume-Uni
nous éclairent ainsi davantage sur ce phénomène et sa diversité.
À Paris,
les actes répertoriés se déroulent en majorité à Paris
intra-muros et s’amenuisent à mesure qu’on s’en éloigne. Ce qui créé
un contraste entre le centre et sa
banlieue, une banlieue qui présente moins d’actes islamophobes.
les actes répertoriés se déroulent en majorité à Paris
intra-muros et s’amenuisent à mesure qu’on s’en éloigne. Ce qui créé
un contraste entre le centre et sa
banlieue, une banlieue qui présente moins d’actes islamophobes.
Actes
islamophobes à Paris et à Londres. Author provided, Author provided (No reuse) |
Cette
distribution est différente à Londres,
où autant d’incidents sont enregistrés aussi bien dans le centre londonien que
dans dans la périphérie.
distribution est différente à Londres,
où autant d’incidents sont enregistrés aussi bien dans le centre londonien que
dans dans la périphérie.
Beaucoup
d’actes se déroulent dans les bus, les trains, les transports en
commun de façon plus générale, dans des espaces du quotidien.
d’actes se déroulent dans les bus, les trains, les transports en
commun de façon plus générale, dans des espaces du quotidien.
Latifa,
qui a participé à notre recherche en tant qu’enquêtée à Londres nous relate ce
qui lui est arrivé :
qui a participé à notre recherche en tant qu’enquêtée à Londres nous relate ce
qui lui est arrivé :
« Un
homme dans le bus s’est penché vers mois, et a commencé à me faire des
commentaires désobligeants allant jusqu’à m’appeler une “terroriste de Daech” ;
en fait il me touchait. »
homme dans le bus s’est penché vers mois, et a commencé à me faire des
commentaires désobligeants allant jusqu’à m’appeler une “terroriste de Daech” ;
en fait il me touchait. »
En
France, la majorité des incidents se déroule au sein
d’institutions publiques par exemple une mairie, une école ou un
hôpital. À Paris en particulier, la plupart des actes antimusulmans correspond
à des discriminations individuelles. L’une des personnes que nous avons
rencontrée, Kenza, raconte :
France, la majorité des incidents se déroule au sein
d’institutions publiques par exemple une mairie, une école ou un
hôpital. À Paris en particulier, la plupart des actes antimusulmans correspond
à des discriminations individuelles. L’une des personnes que nous avons
rencontrée, Kenza, raconte :
« Alors
qu’une de mes amies arrivait au lycée, le directeur lui a arraché son voile
devant tout le monde. J’aurai toujours cette image dans la tête, la voir monter
les escaliers morte de honte. »
qu’une de mes amies arrivait au lycée, le directeur lui a arraché son voile
devant tout le monde. J’aurai toujours cette image dans la tête, la voir monter
les escaliers morte de honte. »
Ce type
d’agissements est directement lié à la loi de
2004 qui interdit le port du voile, et autres signes religieux dans
les écoles publiques, au nom de la laïcité
française.
d’agissements est directement lié à la loi de
2004 qui interdit le port du voile, et autres signes religieux dans
les écoles publiques, au nom de la laïcité
française.
Certains
fonctionnaires – au courant ou non des détails de la loi – pensent qu’ils ont
le droit d’étendre le champ d’application de la loi à tous les usagers des
institutions publiques, et non seulement aux élèves des collèges et lycées.
fonctionnaires – au courant ou non des détails de la loi – pensent qu’ils ont
le droit d’étendre le champ d’application de la loi à tous les usagers des
institutions publiques, et non seulement aux élèves des collèges et lycées.
En
France, le niqab
(ou voile intégral) a été interdit en 2010 dans tous les espaces publics,
ce qui n’est pas le cas du foulard. Ainsi, l’islamophobie en France semble
relever d’un fait plus institutionnel qu’uniquement individuel.
France, le niqab
(ou voile intégral) a été interdit en 2010 dans tous les espaces publics,
ce qui n’est pas le cas du foulard. Ainsi, l’islamophobie en France semble
relever d’un fait plus institutionnel qu’uniquement individuel.
Des
victimes et des auteurs très différents
victimes et des auteurs très différents
Dans les
deux pays, les principales victimes sont les femmes voilées.
En France, elles sont majoritairement étudiantes.
deux pays, les principales victimes sont les femmes voilées.
En France, elles sont majoritairement étudiantes.
L’originaire
sud-asiatique ou nord-africaine des victimes (respectivement britanniques et
françaises) est aussi corrélée à l’histoire
coloniale et migratoire de chaque pays.
sud-asiatique ou nord-africaine des victimes (respectivement britanniques et
françaises) est aussi corrélée à l’histoire
coloniale et migratoire de chaque pays.
‘Une femme brandit une pancarte après les attaques de Charlie Hebdo en 2015. Shutterstock |
Les hommes
blancs sont les principaux auteurs d’agressions islamophobes au Royaume-Uni
et sont perçus comme entretenant un rapport de domination sur les minorités
ethniques et religieuses. Mais en France, il semble y avoir parité en la
matière, car nous avons constaté qu’il y a autant d’hommes que de femmes parmi
les agresseurs.
blancs sont les principaux auteurs d’agressions islamophobes au Royaume-Uni
et sont perçus comme entretenant un rapport de domination sur les minorités
ethniques et religieuses. Mais en France, il semble y avoir parité en la
matière, car nous avons constaté qu’il y a autant d’hommes que de femmes parmi
les agresseurs.
Certaines
Françaises – se revendiquant d’un certain féminisme
– dénoncent le port du voile, considérant qu’une femme voilée ne peut pas être
féministe.
Françaises – se revendiquant d’un certain féminisme
– dénoncent le port du voile, considérant qu’une femme voilée ne peut pas être
féministe.
Le rôle
de l’État
de l’État
Nos recherches se sont
également penchées sur la façon dont l’État, dans certains espaces, favorise
certains agissements islamophobes.
également penchées sur la façon dont l’État, dans certains espaces, favorise
certains agissements islamophobes.
Le modèle
républicain français ne distingue pas les citoyens français sur des critères
d’origine, de race ou de religion, et l’absence de statistiques dites ethniques
empêchent selon certains de mettre en place des outils efficaces pour lutter
contre de telles discriminations ce qui peut expliquer pourquoi il y
a moins d’actes signalés en France.
républicain français ne distingue pas les citoyens français sur des critères
d’origine, de race ou de religion, et l’absence de statistiques dites ethniques
empêchent selon certains de mettre en place des outils efficaces pour lutter
contre de telles discriminations ce qui peut expliquer pourquoi il y
a moins d’actes signalés en France.
Le
Royaume-Uni, quant à lui, promeut plutôt le multiculturalisme et l’inclusion de
la diversité ethnique et religieuse dans la société. Malheureusement, certains
s’opposent à cette approche multiculturelle et adoptent des comportements
racistes à l’encontre de celles et ceux qui « n’appartiendraient
pas » au Royaume-Uni. Ces différents facteurs influencent aujourd’hui les
communautés musulmanes à participer dans les débats politiques
et à s’engager dans la société.
Royaume-Uni, quant à lui, promeut plutôt le multiculturalisme et l’inclusion de
la diversité ethnique et religieuse dans la société. Malheureusement, certains
s’opposent à cette approche multiculturelle et adoptent des comportements
racistes à l’encontre de celles et ceux qui « n’appartiendraient
pas » au Royaume-Uni. Ces différents facteurs influencent aujourd’hui les
communautés musulmanes à participer dans les débats politiques
et à s’engager dans la société.
Les
approches française et anglaise décrivent le rôle que joue l’État dans la
détermination des actes antimusulmans et des personnes impliquées, à tel point
que l’État a été
reconnu comme l’un des cinq piliers de l’islamophobie. Les
gouvernements des deux pays devraient donc être plus critiques et conscients du
rôle que jouent leurs politiques
dans les expériences quotidiennes de l’islamophobie.
approches française et anglaise décrivent le rôle que joue l’État dans la
détermination des actes antimusulmans et des personnes impliquées, à tel point
que l’État a été
reconnu comme l’un des cinq piliers de l’islamophobie. Les
gouvernements des deux pays devraient donc être plus critiques et conscients du
rôle que jouent leurs politiques
dans les expériences quotidiennes de l’islamophobie.