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Afrique du Sud: des visas australiens pour les fermiers blancs «persécutés»

LePoint Afrique, 15/03/2018

La
proposition vient du ministre de l’Intérieur australien. Celui-ci envisage des
visas humanitaires ou de réfugié pour les fermiers blancs d’Afrique du Sud. La
proposition a suscité l’incompréhension à Pretoria.
Les
fermiers blancs d’Afrique du Sud sont les premiers concernés par la réforme
agraire à laquelle s’attaque le nouveau président sud-africain Cyril Ramaphosa.
Ici, des membres d’organisations sud-africaines de fermiers avant une marche
organisée en novembre 2017 pour protester contre les attaques de fermes. ©
GIANLUIGI GUERCIA / AFP
Le
gouvernement conservateur australien envisage de faciliter la délivrance de
visas pour les agriculteurs sud-africains blancs afin qu’ils puissent fuir les
«conditions atroces» dans lesquelles ils se trouvent et gagner un
«pays civilisé». Le ministre australien de l’Intérieur, Peter Dutton,
chargé des questions d’immigration, a déclaré que ces agriculteurs méritaient
une «attention spéciale», ajoutant qu’il étudiait les possibilités
de les accueillir sur des visas humanitaires ou de réfugié.
La menace
de saisie des terres à l’origine de la proposition
Peter
Dutton a évoqué des informations de presse sur des saisies de terres et des
violences visant les agriculteurs blancs. « Si on regarde les images, si
on entend les histoires et si on lit les récits, ils font face à des conditions
atroces, a-t-il dit mercredi soir au Daily Telegraph. J’ai demandé à mon
ministère d’examiner les options et la façon dont nous pourrions fournir de
l’aide, car je crois vraiment (…) que les gens ont besoin d’aide, et ils ont
besoin d’aide de la part d’un pays civilisé comme le nôtre. »
Le
ministre australien de l’Intérieur chargé des questions d’immigration a ajouté
que les fermiers blancs d’Afrique du Sud travaillaient dur. « Je crois que
ces gens méritent une attention spéciale, et nous la leur accordons maintenant. »
Les agriculteurs en question pourraient être éligibles à un visa dans la
catégorie « persécution intérieure » ou « humanitaire »,
a-t-il ajouté. Normalement, les Sud-Africains qui veulent s’établir en
Australie doivent obtenir, par exemple, des visas de travailleur qualifié.
Environ 200 000 Sud-Africains vivent en Australie.
Pretoria
réfute l’argumentation du ministre australien
La
proposition a été immédiatement balayée par Pretoria. Ndivhuwo Mabaya,
porte-parole du gouvernement sud-africain, a ainsi déclaré à la BBC que
« personne ne d(evait) avoir peur de quoi que ce soit ». « Le
programme de redistribution sera mené conformément à la loi, a-t-il déclaré.
Nous restons une nation unifiée ici en Afrique du Sud, à la fois noire et
blanche. » Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, arrivé au pouvoir en
février, s’est engagé à « accélérer » la réforme agraire destinée à
redistribuer des terres de la minorité blanche au profit de la majorité noire
afin de « corriger les injustices » du passé. Nombre d’agriculteurs
blancs craignent que l’Afrique du Sud ne suive la voie du
Zimbabwe voisin
, où la réforme agraire et la saisie brutale des
terres ont plongé le pays dans une crise économique sans précédent.
Une
démarche surprenante vu la politique australienne à l’égard des migrants
Il y a quelques
mois, des demandeurs d’asile et des réfugiés détenus dans un camp australien
offshore avaient obtenu 70 millions de dollars australiens (44,5
millions d’euros) de dédommagements pour détention illégale et mauvais
traitements à la suite d’un recours collectif. L’Australie essuie les foudres
d’organisations de défense des droits de l’homme, de même que de l’ONU, pour sa
politique extrêmement dure vis-à-vis des demandeurs d’asile, dont bon nombre
viennent d’Iran, d’Irak, de Somalie ou d’Afghanistan. Sa marine repousse
systématiquement les bateaux de clandestins. Ceux qui parviennent à gagner ses
côtes malgré tout sont placés dans des camps de rétention hors de l’Australie,
comme à Manus, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, ou sur Nauru, petite île du Pacifique.
Même si leur demande d’asile est fondée, ils ne seront pas acceptés sur le sol
australien, Canberra ne leur offrant que la possibilité de s’établir dans un
pays tiers. Ou de rentrer chez eux.