General

Stop aux cadeaux “genrés” pour les garçons et les filles à Noël, laissons-les décider!

Sylvain Max 24/12/2017
La dernière étude de l’ONG britannique “Let Toys Be Toys” (que l’on peut traduire en français par “Laissons les Jouets Être des Jouets”), publiée le 6 décembre dernier, montre que les stéréotypes de sexe n’ont pas encore été éradiqués des catalogues de jouets de Noël britanniques.

En effet, les filles y sont représentées deux fois plus avec des jouets imitant des activités domestiques, sept fois plus avec des jouets liés au soin et à l’éducation des enfants et douze fois plus avec un bébé dans les bras! À l’échelle européenne, les tendances sont similaires même si peu d’études scientifiques sont disponibles. En France, une étude est en cours pour les catalogues de jouets de Noël 2017.
Les jouets ne devraient être que des jouets
Les jouets ne servent pas qu’à jouer! En effet, ils permettent aux enfants d’explorer leur environnement et d’en construire une représentation mentale, bref: d’apprendre. Mais aussi, les jouets permettent aux enfants de construire leur identité et de se projeter dans le futur grâce à des modèles, bref: de grandir.
Au vu de l’importance des jouets dans le développement d’un enfant, pourquoi acceptons-nous en tant que parents, enseignants et/ou citoyens que ces outils pour apprendre et grandir soient tellement teintés de représentations stéréotypées?
Déjà, il est important de noter que les parents n’acceptent pas cet état de fait. Une étude australienne récente a interrogé 858 parents. Les principaux résultats montrent que 92% des parents d’enfants de 0 à 3 ans affirment qu’il est important que les filles et les garçons soient traités de la même façon. De plus, 79% d’entre eux veulent agir directement pour aller à l’encontre des stéréotypes traditionnels de sexe.
À un niveau sociétal, il est intéressant de noter que les attitudes des consommateurs évoluent également. Une étude publiée en septembre dernier intitulée “The Future is FeMale” (BETC et groupe Havas) a interrogé plus de 12.000 adultes dans 32 pays. Il en ressort que 61% des femmes et 46% des hommes pensent que les enfants devraient être élevés sans stéréotypes de sexe.
Comment les distributeurs et les fabricants de jouets peuvent-ils accompagner cette tendance? Déjà en prenant conscience du problème des stéréotypes dans l’industrie du jouet. John Frascotti, le président d’Hasbro précise: “nous voulons être inclusifs dans notre approche par rapport au sexe et à l’origine ethnique. Au lieu de penser, ça c’est une marque de garçon, ça c’est une marque de fille, nous voyons ces marques comme mixtes.”
Vers la mise en place de bonnes pratiques
À l’instar de l’ONG “Let Toys Be Toys” en Grande Bretagne, il serait important d’avoir un observatoire français des stéréotypes dans l’industrie du jouet afin de promouvoir les bonnes pratiques dans cet univers particulièrement sensible sur la question (le sont aussi la littérature jeunesse et les manuels scolaires).
Des initiatives locales de catalogues contre-stéréotypiques ont fleuri en Europe: Super U pour la France (depuis 2012), Toy Planet en Espagne (depuis 2013), Top Toy en Suède et au Danemark (depuis 2012), mais ces initiatives restent limitées et n’ont pas créé une nouvelle norme dans le monde des distributeurs de jouets. Ces entreprises ont communiqué positivement sur cette question sans pour autant accompagner un changement sociétal plus large.
De manière plus pragmatique, il faut vraiment en finir avec l’opposition filles/garçons dans les rayons des magasins, les catalogues de jouets et les sites internet. Ne pas toujours opposer filles et garçons mais les réunir autour d’un même jouet. Lorsqu’un jouet est accompagné d’un enfant il serait préférable de toujours mettre un binôme fille/garçon. Il est à noter que dans les catalogues de jouets d’enseignes plus “haut de gamme”, aucun enfant n’est représenté. Il est à remarquer également que parfois les visuels sont proposés par les fabricants directement, et ainsi un même visuel stéréotypé va se retrouver dans plusieurs catalogues.
Ne plus réserver le rose aux filles et le bleu aux garçons mais proposer des modèles aux couleurs plus neutres comme le fait Oxybul Eveil et Jeux. Trop longtemps les couleurs bleu et rose ont été utilisées pour segmenter le marché du jouet et ainsi augmenter les profits. En effet, les fabricants et les distributeurs ont la possibilité de vendre en plus grande quantité plusieurs versions d’un même jouet (une version “fille” et une version “garçon”).
Ils ont donc joué un rôle non négligeable dans la socialisation silencieuse et différenciée des petites filles et des petits garçons en apprenant les “bons” ou “mauvais” comportements appropriés pour chacun des deux sexes. La prochaine étape sera donc de revenir sur cette opposition fille/garçon et plutôt trouver une catégorie commune supra-ordonnée.
Enfin, laissons les enfants décider! Le domaine du jeu est le seul domaine dans lequel l’enfant peut décider comme il veut (enfin, théoriquement…). Les autres domaines sont le royaume des parents: l’alimentation, l’éducation, l’habillement, les règles de vie, etc. Ne contraignons pas les enfants, sur ce domaine qui leur est dédié, avec nos stéréotypes de sexe.