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Rémi Bordes, un Népalais (presque) comme les autres

Anne Both 07.12.2017
Dans la plupart des cas, la notion d’« observation participante », la méthode d’immersion dense des anthropologues dans une société, se révèle galvaudée. Dans celui de Rémi Bordes, elle dépasse les limites de son acception. 

En effet, le récit qu’il livre dans son Chemin des humbles s’apparente à une mise à l’épreuve de sa conception de l’enquête de terrain. Pour ce maître de conférences, responsable de la section népali à l’Inalco (Institut national des langues et civilisations orientales), à Paris, « tant qu’on n’a pas partagé la nourriture, essayé les remèdes, bu l’eau, emprunté les véhicules de la même manière que la moyenne des autochtones, on restera un étranger ».
Qu’à cela ne tienne. Lors de ses trois premiers séjours au Népal, dont le deuxième d’une durée d’un an, Rémi Bordes n’a pas rechigné à se tenir longtemps assis en tailleur, à se laver à l’aube avec de l’eau glaciale, à se moucher sans mouchoir, à ne faire que deux maigres repas par jour. Afin de comprendre les habitants d’un petit village indo-népalais situé à l’extrême ouest du pays, il s’est donc abandonné à leur mode de vie, non de manière anecdotique, mais au contraire sans retenue ni limite, et durablement.
Quand, en 1998, il quitte Bordeaux pour se rendre en Inde en car, il est étudiant et encore indécis sur le lieu où il posera son sac. Peu importe du reste, les circonstances et notamment les personnes qu’il croisera décideront pour lui. Il se laisse donc porter par une série de rencontres qui l’amènent à Jaseili, où vivent 150 personnes, toutes de la même caste, celle des oli, de rang brahmanique inférieur. Bientôt, à la faveur de circonstances festives, le jeune homme est adopté, rituellement, comme frère des femmes du village et devient, en quelque sorte, le fils d’une famille…