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Bernard Bouton, dessinateur : “La liberté d’expression n’est pas vraiment garantie ”

Bernard Bouton est un
dessinateur de presse indépendant français vivant dans la région lyonnaise. Son
premier dessin a été publié dans l’hebdomadaire L’Express en 1974. Il a depuis lors publié
dans de nombreuses publications et a participé à de nombreux concours. Il est
secrétaire général de la FECO, Fédération des Organisations de Dessinateurs de
Presse et d’Humour. Il a bien voulu répondre à nos questions.
 

Milena Rampoldi : Que signifient pour
vous votre profession et votre art ?
Bernard Bouton : Le dessin est un moyen d’expression
qui permet de faire passer une idée très rapidement (quand le dessin est réussi
!).  Pourquoi faire passer une idée ? C’est
pour moi une façon de réagir à un événement qui m’a attristé ou révolté ou
bien, au contraire, qui m’a enthousiasmé.
Donc c’est un moyen de faire partager une émotion. L’idée
contenue dans le dessin est l’élément primordial, même si la qualité du dessin
a aussi son importance.
Il ne s’agit pas pour moi d’asséner des
“vérités” mais plutôt de provoquer une réflexion chez le lecteur sur
des sujets importants. Car les grands problèmes comme la pollution, les inégalités,
le racisme, la censure, l’intolérance …. ne sont pas simples. Alors chacun
d’entre nous peut apporter sa part de réflexion pour faire un peu bouger les
choses. Faire rire avec un dessin est aussi une manière de faire passer une
idée.
Quelles sont les thématiques principales que
vous affrontez dans vos dessins ?
La liberté d’expression, et la liberté de façon générale
; la lutte contre toutes les formes d’injustice, et il y en a beaucoup !! (injustices
faites aux femmes par rapport aux hommes dans de nombreux domaines, injustices
vis-à-vis des migrants, des Palestiniens, des victimes de toutes les
guerres…).
Comment lutter contre le racisme et la
discrimination par le moyen de l’art ?
Avec un dessin on peut lutter contre le racisme à une
toute petite échelle. Par exemple en dénonçant un acte raciste ou en mettant en
lumière une action discriminatoire qui font l’actualité. Avec un dessin on peut
faire rire aux dépends des racistes mais on rit entre gens tolérants, mais le
raciste restera intolérant. On peut lutter contre un acte raciste par la
publicité donnée au dessin, mais pas contre le racisme lui-même.
La seule façon de lutter contre l’intolérance est
l’éducation. Il faut faire appel à l’intelligence des gens en étant soi-même
suffisamment intelligent pour essayer de comprendre pourquoi certains sont
intolérants. Et résoudre le problème ensemble. Quand je suis dans un jour
optimiste, je pense que c’est possible, mais que ça prendra des siècles….
Quand je suis dans un mauvais jour j’évite de penser…
On a l’impression que la caricature politique
est en voie de disparition en France. A quoi cela est-il dû à votre avis ?
Je ne sais pas si la caricature politique est en
voie de disparition en France. Il est certain qu’on est loin de l’âge d’or du
temps de Daumier à une époque où la presse a été assez libre pendant une
certaine période. Les journaux deviennent peut-être plus prudents par peur des
procès. Et là on aborde votre dernière question :
Quels sont selon vous les obstacles principaux
à la liberté d´expression et comment lutter pour cette liberté ?
La liberté d’expression n’est pas vraiment garantie. Même
si on ne peut pas véritablement parler de censure, les médias sont quand même
influencés par le pouvoir politique et les pouvoirs économiques. Récemment on a
vu comment des journaux ont été menacés de procès chaque fois qu’ils ont
dénoncé un scandale politique par exemple.
Et puis il y a une certaine autocensure de la part des
dessinateurs, toujours pour les mêmes raisons.
Dans cette période de crise où il est difficile de
trouver du travail, le dessinateur peut rester prudent pour des raisons
économiques.
Les journaux et sites d’informations virtuels sur
Internet sont une bonne opportunité pour faire fleurir une certaine liberté
d´expression.
Pouvez-vous expliquer un de vos dessins
préférés à nos lecteurs ?
J’ai choisi ce dessin qui était ma carte de vœux pour
2017. Je la voulais optimiste. En 2016 les attentats de Daesh, Boko
Haram…..etc. ont terrorisé le monde. J’ai voulu que le passage vers 2017 soit
un moment d’espoir. Alors, après la somme des attaques de 2016, un petit espoir
transforme 2016 en 2017 !