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Migrants, Schengen, terrorisme : comment le complexe militaro-industriel européen prospère sur la peur

21 Février 2017

L’afflux de migrants ? Un terrain de jeu pour tester de nouvelles technologies, des barrières « intelligentes » aux chiens robots en passant par les drones douaniers. La montée des droites extrêmes en Europe ? Une aubaine pour bâtir murs et barbelés à trois millions d’euros le kilomètre. Les groupes islamistes extrémistes ? Une perspective de « forts taux de croissance ». Ainsi va le business de la sécurité aux frontières, en plein essor depuis une décennie. Enquête sur ce nouveau complexe militaro-industriel de plus en plus influent en Europe.

Île de Lesbos, Grèce. À une portée de fusil des côtes turques, les flots agités de la mer Égée charrient, ce matin, des dizaines de rafiots surchargés d’hommes, de femmes et d’enfants. Trois bonnes centaines rien qu’en une demi-journée. Cris, embrassades, pleurs… Une matinée habituelle sur cette île à l’extrémité est de l’Europe, depuis que les guerres, les régimes autoritaires et l’instabilité qui a suivi les printemps arabes ont jeté des millions d’errants sur les route de l’exode.

Ces deux dernières années, les médias ont scrupuleusement relaté la plus grave crise migratoire que connaît notre continent depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale. Sous l’angle humain, bien sûr, en couvrant l’odyssée des réfugiés fuyant dictateurs et terroristes. Sous l’angle politique, ensuite, en exposant la difficulté des États de l’Union à agir de concert face à ces afflux massifs. Or, ce phénomène a rarement été traité sous l’angle économique : quel est le coût du renforcement des frontières de l’Union ? Quels industriels se sont révélés les grands gagnants de cette crise ? Les technologies de surveillance qu’ils commercialisent sont-elles même efficaces ?