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Pays Basque : une école alternative sans cartables ni devoirs fait sa deuxième rentrée

18 Septembre 2016

Créée en 2015 au cœur du Pays Basque, l’école primaire de Bihotza refuse de se conformer au modèle éducatif traditionnel. Avec des valeurs comme le partage et l’éveil de la curiosité au cœur de sa philosophie d’enseignement, l’école s’impose comme l’une des toutes premières écoles alternatives de l’hexagone. Avec sa petite dizaine d’élèves, elle a fait en septembre sa deuxième rentrée, soufflant un petit vent de liberté grâce à une école hors normes tout sauf buissonnière.

Une école avec la liberté en clé de voûte

Ouverte en septembre 2015, quelques mois à peine après que l’idée a germé dans les cerveaux d’Émilie, habitante d’Orègue au Pays Basque, et de sa fille, l’école de Bihotza accueille cette année ses élèves pour la deuxième fois. Bihotza, signifie « le cœur » en langue basque. Au début entourée d’interrogations de la part des habitants du village, l’initiative trouve aujourd’hui un écho favorable et attire même de plus en plus de curieux. Et pour cause, les sourires sur les visages de ces enfants qui peuplent la cour de récréation ont de quoi donner envie.

Cette école un peu particulière, où l’on a banni cartables et devoirs à la maison, est née de l’initiative d’une poignée de parents qui, déçus par le système éducatif conventionnel, ont décidé de créer une école à leur idée. Là-bas, pas d’esprit de compétition encouragé par une course aux notes effrénée, mais une pédagogie recentrée sur la spécificité de chaque élève. La petite classe, composée en 2015 d’à peine six élèves, avance au rythme de chacun, grâce au zèle et à la patience prodigués par les enseignants (au nombre de trois cette rentrée). Les emplois du temps ont également disparu, permettant aux élèves de décider eux-mêmes quand s’exercer aux mathématiques, au français, ou encore à la couture ou à la chimie. Un véritable pas en avant dans la stimulation de l’autonomie et des goûts personnels de l’enfant.

Une alternative à l’éducation conventionnelle

Si l’école reste homologuée et encadrée par l’État, elle fonctionne sur un mode associatif. Avec un budget de 150€ par mois et par enfant auquel contribuent directement les parents, l’école assure ses cours grâce à l’aide de trois enseignants. Aujourd’hui, si sa fondatrice est consciente de l’immense victoire que cette école représente d’ores et déjà — notamment en termes de construction personnelle pour les enfants déjà intégrés —, elle souhaite aller plus loin dans la démarche et ouvrir un collège.

Mais si elle est aussi intéressante, c’est que cette initiative semble naître d’un réel besoin, tant de parents que d’enfants qui ne se satisfont pas du système éducatif actuel. Pour reprendre la formule de Montaigne, ces parents souhaitent une éducation qui valorise davantage « une tête bien faite qu’une tête bien pleine ». Allant à l’encontre d’une éducation conventionnelle où les budgets sont proportionnellement rétrécis à mesure que les classes s’élargissent, l’école de Bihotza souhaite réinsuffler de la vie à l’école par une méthode moins normée. À Bihotza, donc, pas de cours magistraux, mais davantage d’exploration et d’interrogation autour de la nature, par exemple. Une approche qu’il est possible de retrouver ailleurs dans le monde, dont dans la fameuse école japonaise Fuji Kindergarten de l’architecte Takaharu Tezuka.


Fondée autour des valeurs d’échange et d’épanouissement, Bihotza renvoie aux méthodes pédagogiques de Célestin Freinet. Pédagogue du début du XXè siècle, il recommandait en effet une éducation qui incorporerait l’expression libre, le plan de travail individuel, l’auto-correction ou encore la prise de décision coopérative au sein de la classe. Aujourd’hui, on pourrait aussi citer les travaux de la pédagogue et ancienne institutrice Céline Alvarez, qui affirmait il y a peu sur France Inter que « L’être humain n’apprend pas ce qui ne le motive pas. » Prônant l’action de l’élève plutôt que sa passivité, Céline Alvarez fait aujourd’hui la promotion d’une éducation davantage à l’écoute d’une science pédagogique. Intéressé par ses expérimentations et interpellé par ses conclusions, le Ministère de l’Éducation l’aurait d’ailleurs contactée. Pour une révolution prochaine de l’École ?