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Congo-Brazzaville: zones d’ombre autour des opérations en cours dans le Pool

Trésor Kibangula, jeuneafrique, 16 Aprile 2016. 


Peu d’informations filtrent sur les
“opérations de sécurisation” en cours dans le département
du Pool, situé dans le sud du Congo-Brazzaville. 

Plus de 10 jours
après leur déclenchement, aucun bilan n’est disponible alors que
l’opposition et la société civile parlent des “bombardements”
quotidiens.



«C’est le black-out total»,
explique un membre de la société civile à Kinkala, chef-lieu du
département du Pool, qui a requis l’anonymat pour «des
raisons de sécurité». 

En représailles à  l‘attaque
de Brazzaville dans la nuit du 3 au 4 avril, attribuée aux Ninjas
Nsiloulou
, les autorités congolaises ont lancé la traque
de leur
chef, le pasteur Ntumi
, retranché dans ses fiefs du sud du
pays.


Y a-t-il eu des bombardements ?


Selon des ONG et des opposants à
Denis Sassou Nguesso, nouvellement réélu à l’issue d’une
présidentielle controversée, plusieurs localités du Pool subissent
depuis une dizaine de jours des «bombardements» des
forces de sécurité.
Il s’agit d’opérations policières
pour rechercher les auteurs des actes de nature terroriste.


«Il faut savoir mesurer la
teneur de chaque mot», suggère pour sa part le colonel Jules
Monkala Tchoumou. 

Joint par Jeune
Afrique, 
le porte-parole
de la police congolaise se refuse de parler d’un «quel conque
bombardement» dans le Pool.


«Il s’agit en revanche
d’opérations policières pour rechercher les auteurs des actes de
nature terroriste perpétrés le 4 avril dans les quartiers du sud de
Brazzaville», explique-t-il. 

Mais l’officier reconnaît par
ailleurs l’existence d’une «opération de destruction des
centres de commandement du pasteur Ntumi», ancien chef de
guerre qui exerçait depuis 2007 les fonctions du délégué général
chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation
des séquelles de guerre. Avant d’être révoqué
le 6 avril
.



Quid du bilan matériel ou humain ?


Le colonel Jules Monkala Tchoumou
martèle que «les opérations en cours ne ciblent que les
centres de commandement du pasteur Ntumi», lesquels sont
situés tous, selon lui, «en dehors de villages» : que
ce soit à Vindza, à Mayama ou à Soumouna, fief du président du
Conseil national de la résistance (CNR).


À l’en croire, il est encore
difficile d’avancer un quelconque bilan, même du côté des
ex-miliciens Ninjas Nsiloulou qui sont traqués: «Ils
abandonnent leurs centres de commandement» lorsque ces
derniers sont pilonnés.



Mais des sources concordantes
indiquent que des obus ont été largués par erreur, le 6 avril, sur
une école primaire à Vindza, dans le Pool, sans faire des
victimes. 

Une information également diffusée vendredi sur RFI
qui cite Monseigneur
Louis Portella Mbuyu, évêque de Kinkala. Une mission humanitaire de
Caritas local s’est rendue sur place pour tenter d’évaluer la
situation.


Y a-t-il eu «arrestations
massives», tortures, meurtres ou déplacements des
populations dans le Pool?



En attentant, l’ONU s’inquiète de
l’état des droits humains dans cette partie du territoire
congolais. «Des informations font état d’arrestations
massives et de cas de torture en détention, ainsi que du meurtre et
du déplacement des personnes originaires du Pool», a déclaré
mercredi Zeid Ra’ad Al Hussein, haut-commissaire aux droits de
l’homme, soulignant toutefois qu’il était difficile de vérifier
l’authenticité de ces rapports «en raison du manque d’accès
à cette zone par des acteurs indépendants».


Du côté de la police, l’on admet
qu’il y a eu des arrestations dans le cadre de l’enquête en
cours sur l’attaque de Brazzaville. Et ce «à chaque fois
que des indices susceptibles de troubler l’ordre public pesaient
sur certaines personnes», explique le colonel
Monkala Tchoumou, rejetant toute allégation
d’arrestation arbitraire et de torture.


Quant au déplacement des populations
civiles, la police estime que les habitants du Pool, qui ont payé le
lourd tribut lors de la guerre civile de 1997, sont aujourd’hui
«traumatisés et se mettent vite à l’abri»
lorsqu’ils entendent des bruits des armes. 

Ce qui expliquent, selon
elle, les mouvements des civils d’un district à un autre. 

Certains
ont quitté ainsi Mayama pour aller se réfugier à Kindamba, plus au
nord du département.