General

Rudolph Bauer : Sensibilisation à la paix et antimilitarisme conséquent

par Milena Rampoldi. Traduit par Michèle Mialane, Tlaxcala
Original:
Rudolph Bauer: Frieden als Bewusstseinsbildung und konsequenter Antimilitarismus


Une interview du Professeur Rudolph Bauer au sujet de la Conférence contre la guerre, qui a eu lieu le 5 septembre 2015 à Brême, en Allemagne

 
MR : Quelles stratégies permettent la meilleure diffusion de l’idée pacifiste dans nos sociétés?
R.B. J’envisage aussi bien des stratégies parlementaires qu’extraparlementaires, qui devront dans une certaine mesure se compléter mutuellement. Mais les stratégies à elles seules ne suffisent pas, si elles ne s’appuient pas sur des intérêts vitaux de l’humanité et ne sont pas vigoureusement soutenues par la population, les syndicats et les Églises, des associations et organisations de la société civile et, last but not least, par la jeunesse, étudiante ou au travail. 

Comment êtes-vous personnellement devenu antimilitariste ? Quels arguments peuvent convaincre les êtres humains de combattre la guerre et le militarisme ?
J’ai vécu dans mon enfance la Deuxième guerre mondiale, sa fin et l’après-guerre. Depuis j’ai assisté en pleine conscience aux horribles guerres qui ont suivi : la guerre de Corée, du Vietnam, d’Algérie etc., la guerre d’Afghanistan, d’Irak, les guerres en Afrique, au Proche-Orient, en ex-Yougoslavie, des guerres civiles et des guerres « asymétriques: du carnage, du carnage et encore du carnage. Pas besoin de théories pour faire détester la guerre et le militarisme à la grande majorité des êtres humains. Le grand problème, c’est plutôt le sentiment manifeste d’impuissance face à la toute-puissante machine de guerre et les mensonges ainsi que la propagande militariste, qui constituent un véritable lavage de cerveaux.

Quels sont les meilleurs arguments à opposer aux guerres menées hors des frontières nationales, qui prétendent «  défendre les droits humains »?
Toutes les guerres violent les droits humains. Donc il n’existe pas de guerre qui les défende. Toutefois, surtout depuis quelque temps, la propagande de guerre prend les droits humains comme prétexte pour les violer et les ignorer aussitôt après parce qu’on est en guerre. C’est à chaque société, en tant qu’entité politique, qu’il incombe, de lutter pour que les droits humains soient reconnus et respectés en son sein. C’est un processus permanent ; il a un commencement, mais il n’est jamais achevé. Vouloir intervenir dans ce processus, de l’extérieur et par une ingérence militaire ou la fourniture d’armement est tout simplement un crime. Ce ne sont pas les guerres – même déguisées en interventions humanitaires – mais l’entente entre les peuples, la diplomatie et des évolutions sociales vers plus de justice qui constituent les fondements de la reconnaissance et du respect des droits humains.
Comment agir contre les lobbys de l’armement et obtenir un changement de mentalité en Allemagne qui pousse ce pays à cesser d’exporter de l’armement vers les régions en crise ?
La première chose à faire, c’est de n’élire au Bundestag que des députés et partis – d’opposition ou au gouvernement – qui prennent l’engagement contraignant de faire interdire l’exportation d’armes, de proposer un programme de reconversion et d’œuvrer à la promulgation d’une loi qui interdise le lobbying en faveur des armes et des biens d’équipement militaires. Il est un peu plus difficile d’opposer à la spirale de violence où sont pris militaires et politiciens ainsi qu’à la course au profit des industriels et banquiers cette logique humaniste de pacifisme et de justice, dont le but est le bien de toute l’humanité ainsi que de la nature et des créatures qui la peuplent. C’est ce but qui doit être le nôtre.