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Être musulman(s) dans l’Inde de Narendra Modi : la vie de ghetto à Juhapura, entre domination et résistance


Charlotte Thomas

Cet
article se fonde sur des enquêtes ethnographiques longues menées à
Ahmedabad, et principalement Juhapura, entre 2009 et 2014, dans le
cadre d’un doctorat en science politique. Toutes les citations sont
extraites d’entretiens conduits au cours de cette période. 



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Le Gujarat et le district d’Ahmedabad
Le 26 mai prochain marquera la fin de la
première année de mandature exercée par le nationaliste hindou
Narendra Modi à la tête du gouvernement indien. A l’occasion de cet
anniversaire, cet article se propose de revenir sur la situation de la
minorité musulmane dans un pays gouverné par le Bharatyia Janata Party (Parti du peuple indien, BJP), formation politique nationaliste hindoue dont l’idéologie repose sur l’hindutva, soit l’« hindouité » supposée de l’Inde, aux dépens des autres minorités ethniques composant le pays[1]
– notamment les 14% de musulmans et les 3% de chrétiens. Depuis un an,
l’élection de Narendra Modi s’est traduite par des menaces accrues sur
la liberté et les pratiques religieuses des minorités non hindoues, au
premier rang desquelles les quelque 145 millions de musulmans indiens[2].
Cette situation est partagée par l’ensemble de la minorité dans le
pays, avec des spécificités selon le contexte local. Pour cette raison,
cet article traite du cas singulier des musulmans du Gujarat. Il
propose une plongée dans le ghetto musulman de Juhapura, situé à sept
kilomètres du centre-ville d’Ahmedabad, la capitale économique de
l’État.[3]
En effet, à plusieurs égards, regarder ce qui se passe à Juhapura,
c’est comme poser une loupe sur la situation actuelle des musulmans
indiens du Nord.
Tout d’abord, le Gujarat est l’État dans
lequel Narendra Modi a bâti sa carrière politique, et dont il a vanté
les résultats économiques au cours de la campagne électorale de 2014
comme gage de sa bonne gouvernance. C’est également l’État dans lequel
ont eu lieu les pogroms anti-musulmans de 2002 dont Narendra Modi est
considéré comme l’instigateur, quoiqu’il ait toujours été innocenté par
la justice[4].
On parle ici de pogroms et non d’émeutes car les attaquants étaient
exclusivement hindous et soutenus par la puissance publique, face à des
victimes uniquement musulmanes. Les modalités de ces violences sont
également à rapprocher des massacres de population, en ce qu’ils
témoignent d’une volonté de tuer le corps physique et le corps
symbolique de la minorité[5].
Selon les estimations des ONG, les pogroms ont fait deux mille morts,
dont mille dans la seule ville d’Ahmedabad, et 150 000 déplacés
internes. Les violences de 2002 constituent donc l’attaque la plus
violente qu’aient connue les musulmans indiens dans leur pays, qu’il
s’agisse du nombre de victimes comme des modalités d’assassinat.
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Le ghetto ou l’exercice de la domination « au quotidien »
L’une des conséquences à moyen terme de
ces violences a été la formation d’un ghetto à Juhapura. Avant 2002, la
localité est un simple quartier musulman économiquement défavorisé
d’environ 50 000 habitants. Mais le pogrom transforme cet espace en y
entrainant l’afflux massif de musulmans cherchant un entre-soi ethnique
perçu comme protecteur. C’est particulièrement vrai des classes
musulmanes supérieures, qui, pour la première fois, ont été victimes
elles aussi des violences, alors qu’elles étaient épargnées jusque-là.
Leur arrivée transforme la localité en ghetto. Ce dernier se distingue
du simple quartier ethnique par quatre caractéristiques résumées ici :
la contrainte d’installation, le confinement, le stigmate identitaire
consubstantiel et la duplication des institutions par des acteurs
privés, en l’absence de présence publique[6].
Le ghetto ne se caractérise donc pas tant par la dégradation de son
habitat, tel que le sens commun l’entend souvent, que par ces quatre
dispositions qu’accompagnent, entre autres, l’hétérogénéité économique
et l’homogénéité ethnique. Si les quartiers musulmans sont nombreux en
Inde, Juhapura semble donc être, à ce jour, le seul ghetto musulman du
sous-continent. En 2015, on estime qu’il compte près de 500 000
habitants[7].
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Panneau à l’entrée de Juhapura : Saare Jahan se achha Hindustan hamara (Notre Inde est ce qu’il y a de mieux au monde)

Les dispositions strictement définies de
l’espace qualifiant Juhapura de ghetto constituent autant d’actes de
domination de la part des autorités de l’État à l’encontre des habitants
(musulmans donc) de la localité. Instaurant cette relation de pouvoir
par le truchement de l’habitat, le ghetto devient ainsi un dispositif
spatialisé de pouvoir. Il exerce une domination « au quotidien » sur les
habitants et, partant, est une modalité de gouvernance de la minorité
musulmane d’Ahmedabad mobilisée par le gouvernement (local) Modi de
2002 à 2014, et désormais par celui d’Anandiben Patel. Concrètement,
les conditions de vie des habitants de Juhapura, et leurs difficultés
d’accès à une citoyenneté effective les amènent à se considérer comme
des « citoyens de seconde zone ». La domination qu’y exercent les
autorités est aussi protéiforme que pernicieuse. Elle s’infiltre dans le
quotidien des habitants et touche à tous les aspects de leur vie.
Partant, elle pourrait être rapprochée, quoiqu’avec précaution, d’une
forme d’ethnicisation de la citoyenneté indienne. Si formellement, les
citoyens musulmans disposent des mêmes droits que leurs compatriotes
hindous, à Ahmedabad et encore plus à Juhapura, leur ethnicité les
disqualifie d’une citoyenneté effective.
Chaque caractéristique du ghetto
constitue une modalité de cette domination. La première a été, en creux
de la formation du ghetto, la purification des territoires urbains
d’Ahmedabad de leur présence musulmane, et la mise en place d’un
entre-soi ethnique, auquel se superpose l’entre-soi économique pour les
hindous. Cette modalité de gouvernance repose sur la contrainte
d’installation dans le ghetto. Beaucoup d’habitants évoquent leur
souhait de vivre dans d’autres quartiers de la ville mais leur
impossibilité de le faire sans mettre leur vie en danger « en cas de
problème » ; la seconde modalité de gouvernance de la minorité et
stratégie de domination consiste à confiner les habitants de Juhapura,
qui ne peuvent étendre leur localité. En effet, à l’est, le ghetto est
ceint par un carrefour extrêmement fréquenté, et séparé des habitations
hindoues voisines par des no man’s lands ou des « frontières » [borders].
Barbelés et fossés ont été mis en place après 2002 pour séparer les
hindous des musulmans. Au nord, Juhapura est encadré par des immeubles
construits par les autorités et achevés en 2013 : ce sont les logements
des fonctionnaires de police de la ville. Au sud, ce sont les stations
de traitement des eaux usées qui enserrent le ghetto, en plus de
polluer les sols en profondeur et d’apporter leur lot de maladies,
étant construites à distance non réglementaire des habitations. Enfin, à
l’ouest, Juhapura s’ouvre sur un axe routier à quatre voies qui la
traverse, menant vers la région du Saurashtra.
La domination au quotidien des habitants
se traduit également par l’absence des infrastructures et services
publics présents dans d’autres quartiers d’Ahmedabad. A Juhapura, il n’y
a pas d’éclairage public, pas de jardins ou de parcs publics, pas de
routes goudronnées si ce n’est la quatre-voies traversant le ghetto ; il
faut s’imaginer notamment la poussière venue du Saurashtra et avec
laquelle les habitants vivent en permanence, en l’absence de routes
asphaltées. Les habitants y sont tous victimes de ce que les médecins
appellent la « Juhapura cough » (« la toux de Jahapura »), liée à la
poussière. Des problèmes beaucoup plus sérieux sont liés à l’eau livrée
chaque jour mais presqu’impropre à la consommation. Les médecins
interrogés font état des nombreuses maladies respiratoires et digestives
liées à ce problème, ainsi qu’à l’infiltration des produits toxiques
dans les sols, via les stations d’épuration. On ne trouve pas non plus
d’hôpitaux publics, et les quatre écoles publiques ne couvrent qu’à
peine 10% des besoins éducatifs des habitants du ghetto. Ces derniers
évoquent aussi le « harcèlement » administratif dont ils sont victimes
de la part des forces de police, seule représentante de la puissance
publique visiblement implantée dans le ghetto. On y est fréquemment
témoin d’arrestations arbitraires, notamment à l’encontre des jeunes
hommes, ou de fréquents contrôles de véhicules, a fortiori à l’approche de l’Eid – pour y trouver de la viande illégalement introduite dans le ghetto.
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Sarkhei Road, axe à quatre voies traversant le ghetto de Juhapara, municipalité d’Ahmedabad, Gujarat, Inde, mai 2015
Les canaux de la résistance : « self-help » et regard porté vers le Golfe 
Face à ces stratégies de domination, les habitants du ghetto ont mis en place des tactiques de résistance[8]. Elles sont toutes le fruit d’initiatives d’acteurs privés (le « self help ») et n’empruntent guère la voie politique militante, considérée comme inefficace[9].
Le principal canal de cette résistance est le « business ». La sphère
économique est désormais perçue comme la matrice intégratrice à la
société majoritaire pour les musulmans de Juhapura, et leur apparaît
comme le meilleur rempart contre les violences. En analysant leur
discours, deux raisons semblent expliquer cette perception, chacune
adossée au souvenir des pogroms de 2002, qui, dès lors, apparaissent
bien comme un événement au sens plein du terme, c’est-à-dire une
rupture. Économiquement intégrés, participant à l’enrichissement
national, les musulmans se perçoivent comme « utiles » à la société
indienne, et notamment à leurs partenaires hindous ; les uns et les
autres étant liés par une relation d’interdépendance économique. Il n’y
aurait donc aucun intérêt à les éliminer. La seconde raison est liée au
fait qu’en cas de répétition des violences, l’aisance économique
permettra au moins de faire face, qui à une cessation temporaire
d’activités, qui à une réinstallation forcée, etc.
Pour les habitants de Juhapura, le salut
passe donc par eux-mêmes ; comme ils aiment désormais le dire, « we
are self-made angels ». De fait, l’absence d’infrastructures publiques a
été palliée par des initiatives privées ; le développement de Juhapura
étant ainsi le fruit d’une privatisation de l’action publique. Ces
actions ont été conduites par les musulmans aisés de jamaats[10] supérieures arrivées à Juhapura conséquemment au pogrom. Notamment par le biais du zakat[11],
ils financent deux hôpitaux, des dispensaires, des écoles, des
bibliothèques, des cours de soutien et/ou de formation aux examens de la
fonction publique, etc. L’éducation est au cœur des préoccupations des
habitants de Juhapura, toutes jamaats confondues. Elle est directement
liée à l’impératif d’intégration économique déjà évoqué. Par-delà
l’instruction en elle-même, l’éducation est vue comme le moyen d’accéder
à un emploi stable ou rémunérateur et partant, le tremplin vers une
bonne intégration économique. Les filles et les femmes font l’objet d’un
effort éducatif particulier, ce qui, de l’aveu même des enquêtés
(hommes ou femmes) est inédit. Il est également intéressant de noter
qu’outre l’entreprenariat et/ou le commerce, occupations plus ou moins
traditionnelles des musulmans gujaratis, de plus en plus nombreux sont
ceux qui évoquent l’importance de trouver des emplois publics, plus
stables et rémunérateurs, auxquels les musulmans ont traditionnellement
moins accès. Parallèlement à l’aménagement de la localité, les
habitants ont également fait ouvrir des antennes locales des banques
indiennes, entrainé la multiplication des commerces, ou encore équipé
leur propre society (résidence) en y asphaltant les chemins, apportant l’eau, l’électricité, etc.
Dans le sillage du discours sur
l’importance de l’intégration économique, depuis 2013, les références à
la culture dite « du Golfe » se multiplient dans Juhapura. Ceci est
également une conséquence à long terme des pogroms car la paralysie de
l’économie locale en 2002 a poussé les entrepreneurs musulmans à
rechercher d’autres marchés, au premier rang desquels, les pays du
Golfe. Les acteurs évoquent notamment Doha et Dubaï, qui apparaissent
comme les villes les plus attractives pour les migrants ; l’Arabie
saoudite est également mentionnée pour son caractère musulman (« Islamic
credentials ») mais le racisme dont y sont victimes les migrants
sud-asiatiques est souvent évoqué pour expliquer la préférence pour
d’autres destinations. Enfin, Oman fait l’objet d’une représentation
particulière dans les discours, en raison des liens historiques avec le
sultanat. Les habitants évoquent leur attrait et leur admiration
croissants pour les pays du Golfe, autant pour les perspectives
économiques envisageables là-bas, que pour « l’ambiance musulmane » de
ces pays. Les flux économiques entre les entrepreneurs de Juhapura et
les pays du Golfe se multiplient, permettant aux premiers de réaliser
là-bas les profits qu’ils ne peuvent faire directement sur place, pour
les réinjecter ensuite dans le ghetto. Les ensembles résidentiels de
luxe, construits avec l’argent gagné dans le Golfe et sur le modèle de
ce qui s’y voit, se multiplient. Ils alimentent en cela l’augmentation
des prix des logements dans le ghetto. Mais l’attrait pour le Golfe
dépasse la seule sphère économique : des éléments culturels sont
également présents dans le ghetto, comme le traduisent les noms de
l’ensemble résidentiel « al-Bhurooj » ou du restaurant Aladdin.
L’intégration économique par le Golfe de certains habitants de Juhapura
s’accompagne ainsi d’une revalorisation identitaire qui résiste au
stigmate consubstantiel à la forme ghetto. Partant, et bien que cette
observation doive être prise avec mesure, le regard porté vers le Golfe
apparaît, pour le moment, comme une dynamique transnationale permettant
une meilleure intégration des acteurs au contexte local. Les
entrepreneurs aisés de Juhapura ont été courtisés par Modi comme ils le
sont aujourd’hui par A. Patel. Certains entrepreneurs basés à Juhapura
font ainsi le relais entre la minorité et les autorités, facilitant la
venue des entreprises du Golfe au Vibrant Gujarat Summit ou lors du
Business Conclave de février 2014, destiné spécialement aux
entrepreneurs musulmans du Gujarat. Le pont vers le Golfe ne doit donc
pas être compris comme une fascination mimétique conduisant, par
exemple, à la wahhabisation des pratiques religieuses locales. Au
contraire, en creux du désir d’ailleurs, ce regard porté vers le Golfe
semble permettre aux habitants (qui participent à ces migrations)
d’acquérir une certaine reconnaissance, et revalorise ainsi leur
identité individuelle, leur « utilité » (économique notamment) à la
société locale, et donc leur intégration.
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Sculpture près de l’ashram de Gandhi à Ahmedabad représentant des mains faisant le geste hindou de bienvenue, “Namaste”

Ethnicisation et intégration économique : une citoyenneté questionnée
La question soulevée par ce mode de
gouvernance et les effets qu’il induit est celle de la désagrégation
progressive des solidarités intra-ethniques à Ahmedabad, après
l’éclatement de celles inter-ethniques en 2002. En adossant leur salut à
leur seule situation individuelle, et notamment économique, et en se
détachant en cela de tout recours à la puissance publique, les musulmans
s’alignent sur l’un des éléments du récit national proposé par
Narendra Modi, pour qui la croissance économique éclipse tout autre
enjeu sociétal. De plus, ils contribuent à creuser le fossé de plus en
plus marqué dans la société indienne entre une partie de la population
qui reste en marge du projet proposé par Modi, et les catégories qui y
prennent part de plain-pied. De ce point de vue, les options posées aux
musulmans de Juhapura ne diffèrent pas beaucoup de celles qui
s’offrent à l’ensemble de la population indienne. Néanmoins, différence
de taille, l’intégration économique n’est pas d’abord envisagée comme
le moyen de satisfaire des besoins d’enrichissement personnel, mais
comme, en réalité, l’assurance de rester en vie. Ce point interroge
donc les fondements mêmes de l’État indien et la question de la
citoyenneté déjà évoquée ci-dessus entre ethnicisation de celle-ci, et
la survalorisation de l’intégration économique aux dépens des droits
formels censés être garantis par le fait d’être citoyen indien.
En outre, notons que pour les musulmans
issus des jamaats les plus défavorisées, la non-intégration est
désormais double : économique et ethnique. Dès lors, la question des
musulmans les plus défavorisés se pose à nouveau avec acuité, en plus de
celle de l’efficacité réelle de cette intégration économique contre
les violences. Pour les plus pauvres, victimes d’une exclusion ethnique
et économique, quel est leur avenir dans l’Inde de Modi ? Quelles sont
les perspectives pour les jeunes non éduqués et de plus en plus en
marge, y compris au sein du ghetto naguère protecteur ? Certes, les
organisations religieuses sont là pour aider cette clientèle captive,
mais cette aide est fondée sur la charité, et ne permet pas le
développement humain. De plus, celle-ci est bien souvent assortie de la
recommandation expresse d’adopter la pratique de l’islam des
associations bienfaitrices, beaucoup plus rigoriste.
Notes
[1]
Pour les nationalistes hindous, l’Inde est conçue comme
essentiellement hindoue. Ceci dépasse la seule pratique de la religion,
pour y inclure des pratiques quotidiennes telles que le végétarisme.
Les minorités religieuses chrétiennes et musulmanes sont, quant à
elles, pensées comme adossées à d’autres pays. Elles doivent donc
quitter l’Inde, se convertir à l’hindouisme ou restreindre leurs
pratiques religieuses à la sphère strictement privée.
[2]
Réécriture des manuels d’histoire aux dépens des Moghols, campagne
« Ghar Wapsi » (Retour à la maison) de conversion à l’hindouisme,
volonté d’imposer un code civil uniforme remplaçant les lois
personnelles (soit des sortes de codes civils régissant chaque minorité
religieuse), etc. Voir sur ce point la contribution d’Aminah Mohammed-Arif à venir en juin.
[3]
La capitale politique étant Gandhinagar, ville créée lors de la
séparation de l’État du Gujarat de la Province de Bombay dans les années
1960. Gandhinagar est située à une trentaine de kilomètres
d’Ahmedabad.
[4]
Il a, entre autres, été directement mis en accusation par un officier
supérieur de police en poste en 2002 (ayant démissionné depuis). N.
Modi a néanmoins été blanchi par la commission d’enquête mise en place
pour enquêter sur son implication. Sachant que tous les membres de
cette commission étaient issus du Gujarat, ceci questionne d’autant
l’indépendance supposée de ladite commission.
[5]
Les autorités ont publié leur propre bilan des victimes mais celui-ci
ne fait état que de 850 morts, 223 blessés et 2 500 déplacés. Devant le
peu de crédibilité de ces chiffres, les analyses se réfèrent toutes
aux données du rapport de l’ONG Human Rights Watch : « We Have no Order to Save You », 2002.
[6] Sur ces caractéristiques, voir Loïc Wacquant (2007).
[7]
Ce chiffre est le fruit d’estimations personnelles car il n’existe pas
de données publiques, les autorités ayant administrativement éclaté la
zone pour éviter qu’elle ne constitue une zone musulmane homogène.
[8] Etant entendu que la résistance n’est pas nécessairement intentionnellement perçue comme telle par les acteurs.
[9]
En lien avec l’influence ancienne du nationalisme hindou au Gujarat,
les musulmans de Juhapura ne « voient pas la différence entre le Congrès
et le BJP », puisque le premier pratique un « soft hindutva » et que
de nombreuses émeutes ont éclaté sous mandat congressiste. Ainsi, bien
que les trois élus locaux de Juhapura soient effectivement membres du
Congrès, les habitants se servent plus de ces relais locaux pour faire
avancer un dossier personnel précis, le Congrès n’étant clairement pas
considéré comme une alternative politique crédible.
[10] Grosso modo
des communautés ethniques au sein de la minorité musulmane, cette
dernière étant organisée en castes, à l’image des hindous (Ahmad, 1973).
[11] La charité, l’un des cinq piliers de l’islam, car chaque musulman est censé consacrer une part de son revenu aux plus pauvres.