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Notre entretien avec Günter Schenk (version FR)


Bonjour,
Ci-joint
notre entretien avec Monsieur Günter Schenk, membre du Collectif Judéo Arabe et
Citoyen pour la Palestine de Strasbourg sur Palestine et sur la paix.
Merci
Dr. phil.
Milena Rampoldi
Redaction
de ProMosaik e.V.
Dr. Phil.
Milena Rampoldi : Comment peut-on expliquer clairement la différence entre judaïsme
et sionisme, sans être accusés d’antisémitisme ou de relativiser l’holocauste ?



Monsieur
Günter Schenk : En opposant toujours injustices, racisme et oppression,
sans jamais prendre position contre  les Juifs, seulement pour leur
appartenance ou leur religion et ne jamais les vilipender pour ce qu’ils sont.
Nous devons dénoncer le sionisme comme idéologie, qui non seulement sert à
l’exclusion mais détruit aussi le Judaïsme éclairé et européen.
Dr. Phil.
Milena Rampoldi : ProMosaik e.V. rêve de l’époque avant le sionisme quand
les juifs et les musulmans vivaient en paix dans le monde musulman. Comment
peut-on sauver quelque chose de cette époque pour soutenir la paix au Moyen
Orient ?
Monsieur
Günter Schenk : Juifs, chrétiens, musulmans ont cohabité paisiblement
pendant des longues périodes en Orient, y compris dans l’empire Ottoman.
C’était particulièrement le cas en Palestine, partie de la grande Syrie. C’est
de ceci que nous devons informer, en puisant aussi bien dans les témoignages
personnels que dans les rapports authentiques d’autrefois. La volonté et la
capacité de vivre ensemble a été conservée chez les orientaux jusqu’à nos
jours. L’interventionnisme de l’occident y a seulement  fait naître des
forces opposées. C’est particulièrement vrai pour Israël qui y est  un
acteur nocif.
Dr. Phil. Milena Rampoldi : Combien la culpabilité
concernant la Shoa influence les allemands aujourd’hui en renforçant leurs
support aveugle à Israël ?
Monsieur
Günter Schenk : Tout le monde doit accepter que la culpabilité est
toujours liée à la personne, contrairement à la responsabilité, qui peut être
la conséquence des actes d’autrui. Les Allemands, en particulier, doivent
savoir que  la culpabilité née en Europe, à l’égard des Juifs, ne devrait
jamais être utilisée pour faire payer les autres, dans ce cas les Palestiniens.
Israël fait usage abusivement et cyniquement non pas de la culpabilité mais
aussi de la responsabilité des Allemands à des fins politiques. Par-là, des
déjà coupables sont transformés en complices de nouveaux crimes. Pire encore :
des innocents aussi sont fait complices de nouveaux crimes. Des media, guidés
par les intérêts et les gouvernements Allemands ont simplement « oublié »
les Palestiniens qui sont victimes de la création de l’état d’Israël, par la
terreur et les armes, par les Sionistes. Ceci passe simplement aux oubliettes
des media. Conséquence: beaucoup font la fausse équation  Israël = Juifs.
De grands efforts d’information sont nécessaires pour corriger ceci ! Par
contre les gouvernements suivent leurs propres maximes de la REALPOLITIK, qui
consiste surtout à ne pas s’opposer aux forces, considérées plus puissantes.
Dieu seul sait si c’est par conviction ou parce qu’ils sont objets de chantage.
Dr. phil. Milena Rampoldi : Comment est-ce que vous avez trouvé
votre voie vers la Palestine et la critique à Israël ?
Monsieur
Günter Schenk : C’est une longue histoire, qui ne m’est pas tombée du
ciel. Jusqu’à un âge avancé j’ai considéré que le bien-être d’Israël était
synonyme de bien-être des Juifs tout court, ceci en raison de mon 
éducation. C’est seulement par la reconnaissance de ce que s’était passé et
grâce à diverses rencontres, que j’ai dû constater avec stupeur comment ma
perception d’Israël et de la Palestine ne collait ni avec mes convictions ni
avec les valeurs comme l’égalité des hommes. J’ai vécu une rupture.
Jusqu’alors, quand je rencontrais des Palestiniens (ils étaient nombreux dans
les villes universitaires allemandes des années 1960), je ne les écoutais
jamais vraiment, lorsqu’ils me racontaient leur vie misérable de réfugiés dans
leur propre pays. Je ne ressentais pas d’empathie à leur égard. Par contre,
tout ce que faisait Israël me réjouissait…ne représentaient-il pas les
survivants de la Shoah ? Ou, n’étaient-ils pas au moins leurs enfants ? Pour
les nouvelles victimes – les Palestiniens – ce fut  une erreur lourde de
conséquences, comme je l’ai compris plus tard. Cette dissonance cognitive était,
dans mon cas, d’autant plus surprenante, qu’Il y avait, dans l’environnement de
mes parents une famille Juive, et aussi, qu’après le « Printemps de Prague » 
je me suis lié d’amitié avec une jeune juive, qui s’était réfugiée en
Allemagne. Cette ignorance me tourmente jusqu’à aujourd’hui.
Certainement  je me suis laissé séduire par les média dominants, et n’ai
suivi ni ma conscience ni ma capacité d’analyse qui me tiennent à cœur.
Dr. phil. Milena
Rampoldi : Racontez-nous de votre livre Palestine on my Mind. Quelles
sont-elles les thèses principales qui vous voudrez communiquer à nos lecteurs ?
Monsieur
Günter Schenk : Après ce revirement je me suis tourné, à Strasbourg, vers
un groupe de Juifs et non juifs, qui venait  de se constituer au sein d’un
collectif et qui me semblait comme taillé pour ma personne. Je devins un
militant de la cause palestinienne. Aussi en Allemagne me suis-je
rapproché de groupes solidaires. Souvent on m’a demandé, pourquoi je me
tournais juste vers les Palestiniens. Je pensais justifier ceci dans un petit
article. Quand j’en ai parlé à une amie journaliste, domiciliée  à Berlin
et à Paris, elle s’est exclamée spontanément: « c’est une idée
formidable. Beaucoup d’entre nous devaient le faire. Il en est résulté mon
livre de témoignages Denk ich
an Palästina – Palestine on my Mind »
.  Avec ce bouquin
je ne voulais nullement ajouter un autre livre sur ce qu’en appelle le « Conflit
Palestinien »- il en existe de nombreux et des bons ! Mon intention était
par contre d’expliquer aux nombreuses personnes autour de moi, y compris mes
propres frères et sœurs, mais aussi « aux politiques », que nous,
Allemands, Européens, non seulement nous pouvons nous solidariser avec les
Palestiniens, mais aussi nous devons le faire. Ce sont les Palestiniens qui
souffrent du nettoyage ethnique et d’autres atrocités, avant et suite à la
création de l’État d’Israël en 1948. Ce n’est pas parce que « par hasard »
nous sommes allemands, français, irlandais… mais parce c’est une question de
JUSTICE qui nous est chère.
Dr. phil.
Milena Rampoldi : Comment est-ce que vous voyez le futur de l’antisionisme juif
et non-juif et quelles opportunités voyez-vous pour une solution définitive du
conflit israélien-palestinien ?
Monsieur
Günter Schenk : D’abord, laissez-moi parler de l’avenir du Sionisme – chez
Juifs et non-Juifs. Le vrai danger – dans le Proche Orient et au-delà – vient
du Sionisme, je pense que cela ne nécessites guère d’explications. L’erreur
principale, que les Juifs du monde seraient quasiment « condamnés »
au Sionisme est fausse et beaucoup de Juifs la considèrent erronée. Dans le cas
contraire ils devraient tous « plier bagage » et émigrer en Palestine,
maintenant Israël. Ce qu’ils ne font pas, bien sûr. En tout temps le Sionisme
était une idéologie minoritaire parmi les juifs d’Europe. Une idéologie mal
aimée. Les National-socialistes allemands par contre y voyaient un côté
positif ; les deux idéologies ne se ressemblaient-elles pas ? D’une
part, celle des Nazi et de l’autre celle des Sionistes : « L’Allemagne pour nous seulement,
’Ariens’ 
et La
Palestine pour ’nous sionistes’, Juifs seulement ? »
C’est
uniquement la folie des National-socialistes, qui a sonné « la cloche de
chance » pour les Sionistes leur permettant la finalisation de la création
d’Israël, un des derniers états reposant sur le colonialisme, sur la terre des
Palestiniens. La plupart des Juifs dans le monde, comme je l’ai expliqué, ne sont
pas Sionistes ou, ils ne sont pas vraiment au courant de la signification de ce
mot. En Israël cet expression ne joue pas un grand rôle, parce qu’en Israël il
a été largement remplacé par l’Idéologie de la peur « ANGST » et
aussi par le sens de la suprématie, sorte de nouveau « HERRENMENSCHEN »;
cette idéologie qui rend aveugle pour « voir les Autres », de « voir
l’autre ».
Vous
m’interrogez sur mon appréciation de l’avenir de l’Antisionisme chez les Juifs
et le Non-Juifs: Nombreux, toujours plus nombreux sont les jeunes Juifs États
Unies d’Amérique qui prennent leurs distances  avec  toute forme
d’Idéologie, surtout  la sioniste. Ils veulent – simplement – rien
d’entendre. Ainsi les –  souvent extrêmement riches – financiers du
Sionisme cèderont la place aux jeunes, lesquels ont de moins en moins envie de
se faire accuser des méfaits d’un état qui n’est pas le leur et qui prétend
agir en leur nom. Ceci est une question de temps…

Cela est moins visible en Europe mais, comme c’est souvent le cas dans d’autres
domaines, la tendance en Europe va suivre avec un certain décalage de temps.
Mon ami
inoubliable, Dr. Hajo Meyer, grand scientifique et penseur, était certainement
à la fois héritier de ses parents  du judaïsme éclairé européen et,
indiscutablement, un Antisioniste.
D’autres Juives et Juifs allemands, détournent avec dégoût leur regard du
Sionisme qui entend sa « Judaïté » par un communautarisme
nationaliste « bad or
wrong, my country »
, absurde pour un citoyen allemand ou
français.
La
situation varie en France ; de nombreux Juifs se considèrent depuis
longtemps avant tout comme citoyen français aux racines, traditions ou religion
juives et sont fortement attaché aux valeurs de « la République ».
Pour ceux-ci l’idée du Sionisme est étrange et ils se sentiraient plutôt
hostiles à cette idéologie. En Allemagne le plus connu entre eux est le Pr.
Alfred Grosser, Paris. Mais il faut dire qu’en France aussi le Bacille
l’idéologie Sioniste a atteint grand nombre de Juifs, actuellement souvent sous
l’influence des tensions intérieures du pays et des tendances sectaires dans la
société. Ainsi on peut dire que la communauté juive française est divisée,
comme c’est d’ailleurs tout le pays. À long terme il y a raison de faire
confiance à la force de « La République », parce que malgré des
problèmes temporaires, la plupart des Juifs français se sentent « français »
– bien que, naturellement ceci ne fasse pas nécessairement d’eux des Antisionistes.
Plus
difficile me semble le dépassement du Sionisme chez les non-Juifs, qui se constitue,
surtout aux États Unis d’Amérique, presque exclusivement parmi les fondamentalistes
chrétiens, des « églises évangéliques », ce qu’on appelle « Christian
Zionists » Ceci est un héritage de la société états-unienne, ces Millions
des « religieusement séduits » fanatiques croyants, très
difficilement à surmonter. En ce que concerne les Antisionistes non Juifs, ce
qui l’’emporte est la question épineuse : « quelle est votre position pour
la question de la démocratie, à l’égalité ». Celle ou celui qui répond
sans équivoque avec OUI, et per se un Antisioniste – en tout cas pas un
Sioniste. Cet avenir
– pour utiliser le  titre d’un livre du fameux auteur juif-allemand Robert
Jungk – a déjà commencé.
Les Antisionistes
Allemands et aussi des Français et d’autres Européens, qui ne sont pas Juifs,
vont probablement rester dans l’avenir une minorité de politiquement et
socialement particulièrement engagés. Pour être Antisioniste on doit d’abord
avoir compris les effets dangereux du Sionisme et cela demande une connaissance
profonde. Encourager celle-ci est une tâche à laquelle je me  donne
volontairement.
Concernant
le conflit, j’hésite à utiliser le mot « Lösung ». Par contre,
je suis profondément convaincu que vivre ensemble,  Juifs, Non-Juifs, et
Palestiniens dans la Palestine historique, ce petit morceau de la terre entre
la Méditerranée et la rivière Jordan, entre les montagnes enneigées du nord et la Mer Rouge au sud, n’est pas seulement souhaitable, mais
possible. Si vous voulez, appelez ceci  l’état ANTE ! 
Il en ne faut pas
grande chose : le dépassement du Sionisme et son évacuation au dépotoir de
l’histoire. Si des Juifs du monde entier se sont battus pour l’abolition du
racisme, contre  le ségrégationnisme, pour les droit civiques (Civil
Rights), en se plaçant à la pointe du javelot, ce qu’ils continuent à faire, il
me semble absurde que ce soit impossible, justement dans « l’Israël juive ».
Israël en Palestine. La seule condition est l’adieu au dogme de la PEUR de
l’Autre, un « Overcoming Zionism », comme est le titre du Juif
et nommé des US-GREENS à la présidentielle de 2000, Joël Kovel.  À partir
de cela, seulement, le pays peut devenir ce qui a été promis, un « port
sûr », et un bienfait pour tous ses citoyen et voisins. Travailler à cette
tâche vaut la peine !